Carte postale du bout du monde
De Pau en Béarn à Santiago du Chili, du régional à l’international, on rencontre de nombreuses réalisations conçues par l’architecte Émile Doyère au tournant du 20e siècle. Dans son billet, sa carte postale, Cécile Devos évoque la recherche de cette production par-delà les océans grâce au partage de la connaissance rendu possible par Internet.
Carnet du patrimoine
Publié le 17 août 2021
# Pyrénées-Atlantiques, Eaux-Bonnes, Pau
# Opération d'inventaire : Etude urbaine de la ville de Pau
# Epoque contemporaine, 19e siècle, 20e siècle
# Maison, Villa, Théâtre
Chers tous,
Je pars en congés et abandonne à mon cœur défendant, pour quelques jours, l’habitat domestique de Pau, sujet de recherche, de protection et de valorisation sur lequel l’équipe paloise et néo-aquitaine travaille d’arrache-pied. Un ouvrage à paraître dans la collection des "Cahiers du patrimoine" est le fruit attendu de ces efforts.
Au plaisir de vous lire et retrouver à mon retour, bons baisers du Chili !
C’est en suivant la piste d’Émile Doyère (1842-1918), architecte formé à l’école des Beaux-Arts de Paris, que l’idée de cette carte postale a pris corps. Son arrivée dans le Sud-Ouest de la France est due à son poste d’inspecteur des travaux diocésains de Bayonne de 1871 à 1881, collaborant de fait avec Émile Boeswillwald, architecte diocésain, sur ses chantiers. C’est à ce titre qu’il entretient les édifices du diocèse comme la cathédrale de Bayonne ou fait édifier l’église paroissiale Saint-Esprit de Bayonne, publiée dans le Recueil d’architecture : architecture religieuse. Il est l’auteur de nombreuses églises du département des Basses-Pyrénées, entre autres l’église paroissiale de Saint-Jean-Baptiste du Hameau, à Pau.
Les recherches récentes mettent en lumière ses constructions soignées, mélange de science architecturale et d’attention prêtée à l’analyse des spécificités constructives régionales. Il fit édifier plusieurs demeures d’exception pour des notables béarnais ou bordelais, la villa Excelsior des Eaux-Bonnes, la villa la Castanhère d’Artix, étudiée et protégée par nos confrères des Monuments historiques, qui identifièrent la villa Nitot de Pau comme une de ses réalisations.
Il est possible de suivre sa carrière grâce à différents outils : les bases de données de l’Institut national d’histoire de l’art, ou le répertoire des architectes diocésains du 19e siècle. Les années qu’il passe à Pau sont déterminantes, au vu de ses réalisations privées certes, mais aussi de ses prérogatives comme architecte du château de Pau, dont l’attention est tournée vers la préservation de ce monument insigne, et architecte du département des Basses-Pyrénées (aujourd’hui Pyrénées-Atlantiques), voué aux soins des bâtiments départementaux et à l’examen des constructions publiques.
Il termine sa carrière à Santiago du Chili à partir de 1889, vraisemblablement grâce à des contacts tissés à l’École des Beaux-Arts et sur proposition du gouvernement chilien. Magie d’internet, la transformation de la requête « Émile Doyère architecte » en « Emilio Doyère arquitecto » nous mit sur la piste de centres de documentation conservant de nombreux documents inaccessibles à ce sujet. Portrait, réalisations chiliennes et fin de carrière sont ainsi accessibles aux chercheurs grâce notamment à nos collègues de Santiago du Chili. Magie d’internet toujours, le Centre de documentation des Arts scéniques de Santiago du Chili a répondu à nos demandes de documentation sur Emilio Doyère, architecte français émigré à Santiago pour y proposer ses services. L’architecte y œuvra entre autres à la transformation du théâtre municipal de la ville, partiellement endommagé par un séisme en 1906.
Isidora Cruz a eu la gentillesse de partager avec nous ces belles images précieusement conservées et étudiées à l’autre bout du monde ; nous la remercions pour cette carte postale et ce morceau d’exotisme bienvenu.
Clécile DEVOS, chercheur Inventaire du patrimoine, Ville de Pau
Notes
Légende/crédit de l'image :
Le théâtre municipal de Santiago (Chili) après la restauration de Doyère. © Centro de documentación de los Artes escénicas. Municipal de Santiago. Ópera nacional.