L'Inventaire mène une entreprise consacrée à l'étude du mobilier et de l'architecture, dans l'objectif de « recenser, étudier et faire connaître » ce patrimoine. De compétence d'État, il est depuis 2004 devenu une compétence décentralisée aux Régions. Les collectivités qui souhaitent mieux connaître et faire connaître leur patrimoine peuvent, dans le cadre d'un partenariat, solliciter cette compétence et mettre en place une enquête d'inventaire. C'est le cas de Pau, avec une enquête commencée depuis 2010 en collaboration avec la région Nouvelle-Aquitaine et conduite parallèlement à une candidature au label Ville d'art et d'histoire. Le travail se poursuit et a déjà livré quelques beaux résultats, diffusés par le biais d'une offre culturelle labellisée à destination de tous ou de publications (Pau. Un siècle d'architecture sacrée (1801-1905) ; Atlas historique de la ville de Pau). [1]
La Ville de Pau a soutenu le 31 mars 2016 sa candidature à l'établissement d'un secteur sauvegardé devant la Commission nationale des secteurs sauvegardés. Elle a reçu un accueil favorable à sa demande. Le ministère de la Culture l'encourage ainsi à poursuivre sa démarche de connaissance et de protection du patrimoine par l'élaboration d'un Plan de Sauvegarde et de Mise en valeur, sur le périmètre du centre ancien tel que validé par la Commission. La Ville de Pau et la DRAC Nouvelle-Aquitaine ont choisi pour mener à bien cette tâche l'équipe formée autour d'Antoine Bruguerolle, architecte du patrimoine, et Bernard Bouzou, architecte-urbaniste. Leur travail consiste à intégrer le patrimoine palois dans un document d'urbanisme adapté, en proposer des options de restauration le cas échéant, par l'établissement de fiches à l'immeuble, d'un plan et d'un cahier de prescriptions. Ce périmètre protège désormais l'intérieur des édifices, à la différence des anciennes Zones de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager (ZPPAUP), devenues Aires de Valorisation de l'Architecture et du Patrimoine (AVAP), dont la protection est complémentaire.
Commencée en 2017, l'étude est prévue pour durer trois ans. La loi du 7 juillet 2016, dite loi LCAP, relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine a entraîné le rassemblement sous un même terme, site patrimonial remarquable, des anciens AVAP et secteur sauvegardé. Malgré ce changement de nom, les plans adaptés à chacun des dispositifs conservent leurs spécificités.
Véritable entreprise de recherche appliquée collective, cette démarche sert de support à une meilleure sensibilisation au patrimoine et à ses qualités auprès des habitants ou des touristes. Il est certain que les caractères propres à l'architecture paloise gagnent à être ainsi identifiés. Soulignés et mis en valeur par des prescriptions qui tiennent compte de leur histoire ou de leur forme, ils tendent à réhabiliter certains immeubles, et donner une cohérence formelle au tissu urbain et à ses composantes. Les vestiges du passé, même récent, (composition des façades, cheminées, stucs, mosaïques, menuiseries...) ou l'absence de ceux-ci sont répertoriés afin de donner des indications concernant les possibilités de conservation de ces vestiges dans un projet de restauration des immeubles.
L'état des lieux réalisé permet aussi de réfléchir sur l'espace public et la ville, son attractivité et son développement en harmonie avec son passé. Au-delà des enjeux patrimoniaux, les modes de vie en centre ancien sont interrogés à l'aune des évolutions urbaines contemporaines et futures (développement durable, mobilité, efficacité énergétique...).
D'un point de vue méthodologique, l'inventaire du patrimoine et l'étude de secteur sauvegardé vont se nourrir mutuellement, dans l'optique d'un approfondissement de la connaissance de l'architecture domestique notamment. Cette recherche collective s'attache déjà à la définition d'un vocabulaire commun, de typo-chronologies, à l'interrogation sur l'emploi des matériaux, les techniques de constructions ou les modalités de décor, à l'analyse des manières de construire - de l'auteur à l'usager - et aux règles tacites ou écrites qui les encadrent. L'aller-retour traditionnel entre le terrain et les sources historiques, la construction de dossiers d'inventaire, leur approfondissement, trouvent leur prolongement réglementaire dans l'élaboration de fiches et d'un rapport contenant des prescriptions de protection et/ou de restauration et leur argumentation. L'enquête d'inventaire recense ces connaissances pour comprendre au mieux le patrimoine et le faire connaître, l'étude de secteur sauvegardé s'en empare pour proposer des hypothèses de conservation ou transformation, dans le même objectif de pédagogie et de transmission.
Le Plan de Sauvegarde et de Mise en valeur de Pau a été approuvé par arrêté préfectoral le 4 août 2022, soixante ans jour pour jour après la promulgation de la "loi Malraux" qui créait les secteurs sauvegardés.
Cécile DEVOS, chercheur à l’Inventaire du patrimoine, Ville de Pau.