Le développement de la station balnéaire de Bidart
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Publiée le 12 juin 2023
# Pyrénées Atlantiques, Bidart
# Opération d'inventaire : Bidart
# Patrimoine maritime et fluvial
# Du 19e au 21e siècle
Au début du 19e siècle, les médecins ont pris l’habitude de prescrire partout en France des bains de mer pour lutter contre la tuberculose et les autres maladies respiratoires. La douceur de son climat et la pureté de son air ont positionné le Pays Basque au premier plan de cette vogue du tourisme sanitaire, lui offrant un succès sans précédent.
Dès son enfance l’impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III, est tombée sous le charme de Biarritz qu’elle a choisi comme lieu de villégiature. Tant et si bien qu’en 1854, le couple impérial s’y est fait construire une villa, entrainant dans son sillage de nombreux investisseurs. Le succès grandissant de la station balnéaire de Biarritz est à l’origine d’une mutation économique profonde de la côte basque et notamment de la commune voisine, Bidart. Une briqueterie y a été implantée en 1867, suivie de plusieurs carrières, un four à chaux et une faïencerie. En 1866, la commune de Bidart a ouvert par ailleurs son propre arrêt sur la ligne de chemin de fer Bayonne-Irun achevée en 1864. Cette petite gare ferroviaire allait bientôt favoriser l’arrivée de voyageurs dans ce village rural, déjà apprécié comme une étape pittoresque pour qui venait séjourner au Pays Basque.
Lorsque les grands terrains constructibles ont commencé à se faire rares à Biarritz, les riches villégiateurs et investisseurs, à la recherche de vastes étendues naturelles et sauvages, se sont tournés vers Ilbarritz, la partie littorale de Bidart limitrophe du territoire biarrot. Un établissement de bains avec un casino et des villas, puis un centre de balnéothérapie, ont été imaginés le long de la plage d’Ilbarritz dans les années 1870 mais jamais achevés. Sur la colline voisine de la plage, le baron Albert de l’Espée, héritier d’une riche dynastie industrielle, a acheté en 1890 un immense domaine de 60 hectares pour se faire bâtir un extravagant château abritant un orgue monumental. Tout droit sorti d’un roman de Jules Verne, cet hypocondriaque excentrique, atteint de bronchite chronique, appréciait le climat tonique et le grand air du Pays Basque.
En 1892, la reine en exil Nathalie de Serbie, encore officiellement régente du royaume de Serbie pour son fils Alexandre 1er, était à la recherche d’un havre de paix sur la côte basque après l’échec de son mariage avec Milan 1er . Elle a racheté le domaine de l’établissement de bains inachevé d’Ilbarritz et y a fait construire, dans le style des pavillons du 18e siècle, une somptueuse villa. Elle l’a appelée Sacchino en référence au surnom affectueux de son fils. Très appréciée à Bidart, c’est elle qui a offert les fonts baptismaux de l’église paroissiale. Elle présidait également à titre honorifique les festivités locales. Elle a attiré dans son sillage tout un public fortuné en quête d’un nouveau lieu de villégiature en vogue à proximité de Biarritz.
De nombreuses villas ont vu le jour au début du 20e siècle, en particulier dans le quartier Parlementia, à l’image d’Emak Bakia. Comme la demande d’hébergement augmentait, l’hôtel-restaurant La Côte d’Argent a été construit en 1907, le long de la route nationale de Bidart.
Pendant la Première Guerre Mondiale, le château d’Illbarritz a été réquisitionné par l’Etat qui y a installé un hôpital pour les soldats atteints de tuberculose. On y pratiquait les cures de soleil et de grand air dans des lits mobiles équipés de capotes pour éviter les insolations. Dirigé par le docteur Pierre Peyret, qui a joué un rôle fondamental dans le développement des établissements de santé à Bidart, l’hôpital a continué à fonctionner jusqu’en 1922. Le sanatorium Les Embruns a ensuite pris le relai, à l’initiative du Dr Peyret. Situé près de l’embouchure de l’Uhabia, il s’ouvrait également à l’accueil d’enfants atteints de tuberculose ostéo-articulaire. Agrandi par phases successives de construction tout au long du 20e siècle, avec l’ajout de nombreux bâtiments et d’une chapelle, il reste encore de nos jours un important centre de soins. Après-guerre, deux préventoriums ont également vu le jour à Bidart pour accueillir les enfants affaiblis et stopper les formes précoces de tuberculose. On les exposait au grand air marin pendant au moins 4 mois en pratiquant en extérieur la classe et toutes les activités. Un dernier sanatorium a été créé en 1932 sur la commune pour soigner la tuberculose osseuse.
En parallèle de cet important développement de l’accueil médical, la vocation balnéaire de la commune s’est affirmée dans les années 1920 et la population a nettement augmenté, tout comme la construction de résidences principales ou secondaires. Originaire de Bayonne, le peintre Louis Decrept s’est installé à Bidart dans sa maison-atelier Aitakemana, construite par son ami l’architecte Henri Godbarge. La villa Sacchino, rebaptisée Pavillon Royal est devenue un restaurant avec dancing et casino très prisé. A la même époque, le grand hôtel casino La Roseraie, l’une des plus belles réalisations Art Déco de la côte basque, tant du point de vue de l’architecture que du mobilier à l’intérieur, a été construit juste en face du château d’Ilbarritz.
La crise de 29, suivie de la Seconde Guerre Mondiale, a mis un coup d’arrêt brutal au développement de la station balnéaire. Les 10 projets de lotissements élaborés sur la commune à cette époque n’ont abouti qu’à la construction de quelques maisons. Dans les années 50, les congés payés ont permis la démocratisation des séjours à la mer. Un nouveau type de tourisme, moins fortuné, s’est développé avec la construction de maisons plus modestes, la création d’hôtels, gîtes et restaurants plus populaires et l’aménagement de plusieurs terrains de camping. Certaines villas très luxueuses ont été reconverties en centres de vacances.
Aujourd’hui les plages et les paysages bidartarts attirent aussi bien les riches investisseurs que les simples vacanciers. Mais on y croise surtout les surfeurs, qui viennent défier la vague mythique de Parlementia, spot mondialement réputé dans le monde de la glisse.