Voirie

France > Nouvelle-Aquitaine > Creuse > Aubusson

Bien qu´il soit très difficile d´établir le tracé des anciens itinéraires, l´origine d´Aubusson est vraisemblablement à rechercher dans sa position de carrefour routier et dans l´existence de deux promontoires facilement défendables, l´éperon du Château et l´escarpement des Châtres. Ces deux sites, occupés dès l´Âge du Fer, commandaient chacun un itinéraire de long parcours (cf. Desbordes et alii, 1983). Le premier, orienté d´est en ouest, tracé sur un interfluve et placé sous la surveillance stratégique du château, était guidé par le vallon du ruisseau de la Ville, dont il suivait la rive droite. Venu du plateau du Marchedieu, il gagnait l´actuelle place du Marché (ou Prévigier), puis la rue Vieille, avant de joindre le pont de La Terrade sur la Creuse, et poursuivre, sur la rive gauche de la rivière, par la rue Alfred Assolant et la rue de Chabassière en direction de Blessac, de Pontarion et de Limoges. Le second itinéraire, dirigé du nord au sud, reliait le Berry à Aubusson : il se croisait avec le précédent au niveau de la place du Marché, suivait le chemin de la Védrenne par le Creux du Fossé, puis par la rue Jean Jaurès (ancienne rue des Tanneurs), avant de franchir la Creuse sur un pont en pierre à quatre arches, que l´historien Cyprien Pérathon (1886) date de l´époque romaine et situe « un peu au-dessus du lieu-dit le Gour de Saint-Jean », en un endroit aujourd´hui mal localisé. Ce second itinéraire était contrôlé par le camp des Châtres, sis au sud-ouest de la ville, et daté par travaux archéologiques du Premier Âge du Fer (soit du 8e siècle av JC).

Ce carrefour de deux vieilles routes, qui existait donc antérieurement à la conquête romaine, détermina sans doute la naissance d´un bourg, localisé au départ sur le plateau du Marchedieu, puis dans le vallon du ruisseau de la Ville. Ce noyau urbain demeura toutefois longtemps à l´écart de la voie romaine menant de Lyon à Saintes (dite voie d´Agrippa) qui passait par Augustonemetum (Clermont-Ferrand) et Augustoritum (Limoges). C´est cet isolement relatif qui expliquerait, en partie, l´apparition et la survie, jusqu´au 13e siècle, d´une vicomté autonome à Aubusson, concurrente du comté de la Marche.

C´est l´implantation du château, de l´enceinte de la ville murée, ainsi que les deux fondations religieuses de Sainte-Croix et de Saint-Jean-de-la-Cour, qui générèrent de nouveaux itinéraires à l´époque médiévale. Ces chemins sont figurés sur la vue cavalière d´Aubusson datée d´avant 1685 (fig. 1). Il s´agissait de chemins de crête, qui montaient en pente raide vers les plateaux et déterminaient autant d´entrées de ville, comme la rue du Marchedieu (fig. 2), la rue du Mont (fig. 3), la rue de l´Escarpe (fig.4) ou la rue des Méris (fig. 5). Ils sont encore représentés sur le cadastre napoléonien, dressé en 1812 (fig. 6).

Au 16e siècle, Aubusson, « ville de grand bruit pour la fréquentation des marchands », selon le chroniqueur Evrard d´Ahun, constituait à la fois l´aboutissement de ces chemins rayonnants autour de son territoire, mais surtout un centre commercial à proximité du grand axe de Lyon à Bordeaux. Pourtant, l´essentiel du trafic, abandonnant le tracé initial de la via Agrippa, se concentrait désormais sur un « raccourci » parallèle, méridional et plus direct, qui passait par Crocq, Pontcharraud, Felletin, Vallière et Le Compeix et rejoignait l´itinéraire ancien à Sauviat-sur-Vige. C´est ce raccourci, jalonné de relais de poste, qu´emprunta Montaigne pour regagner Bordeaux, lors de son retour d´Italie, en 1581. Felletin en constituait alors une étape privilégiée, préférée à Aubusson.

Aubusson était pourtant raccordée à cette route de Lyon à Bordeaux par le pont des Récollets (rebâti en pierre à partir de 1655), Saint-Jean-de-la-Cour et l´Arbre de la Vierge. Sa traversée, en venant de Farges, se faisait par le faubourg de La Terrade, le pont du même nom, la rue Vieille, la place de Bat (actuelle place du général Espagne) et la rue Tour de Milan. Par là, le voyageur se rendait sur le plateau du Marchedieu et à La Seiglière, puis à La Grave et à Peyrat, pour rejoindre, aux environs de Crocq, la route de Felletin.

En 1731, Daniel-Charles Trudaine, intendant d´Auvergne, fit débuter la construction de la route moderne de Clermont-Ferrand à Limoges (la route nationale 141). Cette œuvre fut poursuivie par ses successeurs, Rossignol (également intendant d´Auvergne) puis Turgot, intendant du Limousin (dès 1761). Ce n´est qu´en 1809 que cette nouvelle route fut parfaitement achevée ; l´atlas de Trudaine (fig. 7) la montre encore en cours d´édification.

Le passage par Felletin fut dès lors abandonné au profit d´Aubusson, ce qui occasionna d´importants travaux pour cette dernière. La rue Vieille étant trop étroite et tortueuse pour supporter le trafic de la nouvelle route, elle fut supplantée par l´actuelle Grande Rue (alors baptisée rue Neuve). Le ruisseau de la Ville, qui y coulait encore à ciel ouvert, fut couvert d´une voûte maçonnée. Le maire Pierre de Laporte (1769-1772) fit aménager la place des Halles (actuelle place de la Libération), la place de Bat (aujourd´hui place du général Espagne) et la place des Récollets (actuelle place Maurice Dayras). Il fit également démolir les anciennes portes de la cité, pour faciliter la circulation.

A l´ouest d´Aubusson, en direction de Limoges, le tracé de la route moderne partait du pont des Récollets, suivait la rive droite de la Beauze, puis dessinait un grand lacet pour gravir la colline de Chabassière et rejoindre l´itinéraire traditionnel vers Farges via La Chassagne. A l´est de la ville, en direction de Clermont-Ferrand, il longeait le ruisseau de la Queuille, pour atteindre l´ancien chemin du Marchedieu au carrefour de la Croix-Rouge, près de La Seiglière. Entre les deux, il traversait le cœur historique d´Aubusson par la Grande Rue.

Cette Grande Rue connut ainsi son âge d´or à partir de la fin du 18e siècle. Elle fit l´objet d´un plan d´alignement, établi par le géomètre Callier en 1830 (fig. 8). Elle supportait non seulement le trafic de la route nationale 141 de Clermont-Ferrand à Limoges, mais aussi celui de la route nationale 142 de Clermont à Poitiers, dont les travaux s´achevèrent en 1835 et qui transitait par le quai Vaveix (fig. 9 et 10) et Guéret. Enfin, elle était également raccordée au « Chemin de Paris » mentionné sur la carte de Cassini (fin 18e siècle) - c´est-à-dire à l´axe nord-sud reliant Tulle à La Châtre et à Paris. C´est la mise en place, au cours du 19e siècle, de cette route départementale n° 1 qui occasionna, après 1840, le percement de la rue Saint-Jean. En 1848 fut rebâti le pont des Récollets (baptisé, dès lors, Pont Neuf), qui fut déplacé plus en aval, dans l´axe de la rue Franche (actuelle rue des Déportés).

Ce schéma (fig. 11), faisant de la Grande Rue le point de convergence de deux routes nationales et d´une départementale, perdura jusque dans les années 1970.

Au milieu du 19e siècle, le tracé de la route nationale 141 de Clermont-Ferrand à Limoges fut simplifié : vers Limoges, il évita désormais la montée de Chabassière pour gagner directement Farges, tandis qu´en direction de Clermont, il remonta la vallée de l´Ouchette pour reprendre l´ancien tracé après Randonnat.

Malgré cette rectification, la traversée d´Aubusson et le franchissement de son site demeurèrent difficiles en raison de sa configuration topographique, à la rencontre de plusieurs plateaux. Ce problème devint de plus en plus prégnant au 20e siècle, avec le développement de la circulation automobile et la multiplication des crues extraordinaires. Les 3 et 4 octobre 1960, la ville connut ainsi une inondation sans précédent, survenue à la suite d'un long épisode pluvieux. Le ruisseau du Fot creva son canal souterrain, trop étroit et engorgé de matériaux charriés par la montée des eaux. Le ruisseau de l'Ouchette entra également en crue, provoquant l'inondation de la Grande Rue et de la rue Franche et paralysant tout trafic. La Creuse sortit de son lit et recouvrit toute la place du Pont Neuf, le quai des Iles et le jardin de l'usine FRLE (Fabriques Réunies de Lampes Electriques) (fig. 12 et 13).

C´est pour remédier à cette situation d'asphyxie du centre ville, qu'entre 1970 et 1975, la municipalité d´Aubusson décida de dévier la RN 141 par les bords de Creuse et le vallon du Léonardet. Cela entraîna la construction de la rue des Lissiers, le recul de la manufacture Hamot, l´édification du pont de Juillet et le comblement du bief qui longeait la rue des Tanneurs (actuelle rue Jean Jaurès).

Périodes

Principale : Antiquité, Moyen Age, Temps modernes, Epoque contemporaine

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Creuse , Aubusson

Cadastre: 2007 non cadastré, domaine public

Localiser ce document

Chargement des enrichissements...