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Historique
La paroisse de Campagne est rattachée dès le IXe siècle à l’archiprêtré du Bugue, et relève à partir de 1214 de l’archevêque de Bordeaux. Ces seules informations plaident pour une création d'un premier édifice cultuel très tôt à Campagne, lors des deux premières phases d'évangélisation dans la vallée de la Vézère entre le Ve et le VIIIe siècle.
Par ses caractéristiques stylistiques et sa mise en oeuvre, le chœur de l'église actuelle, à chevet plat, remonte à la fin du XIe siècle ou au début du XIIe. Bâti en moyen appareil de pierre de taille pour les murs et contrebuté par des contreforts plats réunis au sommet par des arcs brisés formant arcatures aveugles, il présente également la particularité de posséder à l'intérieur des colonnes à chapiteaux à décor de panier et de crosses, chapiteaux qui portent des arcs formant aussi arcatures aveugles en saillie par rapport au nu du mur. En outre, le chevet présente un triplet de fenêtres en simples fentes de jour verticales à large embrasure intérieure plein-cintre formant une trinité dans le chœur – le jour axial a été remplacé par une large fenêtre à remplage flamboyant à la fin du XVe ou au début du XVIe siècle. Toutes ces caractéristiques ou presque se retrouvent dans plusieurs églises de la vallée de la Vézère, aussi bien à Saint-Léon-sur-Vézère qu'aux églises d'Aubas et de Tayac, datées de cette période comprise entre le milieu du XIe et le premier quart du siècle suivant. Cette datation recule donc d'un siècle celle traditionnellement admise d'une construction entre 1169 et 1180 par les seigneurs de Campagne. D'ailleurs, une autre tradition, relayée par les écrits de Marie de Campagne au XIXe siècle et encore par Jean Bouchereau en 1971 (page 281), doit être elle aussi réfutée : le chœur aurait d’abord été la chapelle du château, qui serait ensuite devenue église paroissiale vers la fin du XVe siècle lorsque la nef a été construite. Cette assertion ne résiste pas à l'analyse : d'abord, la maçonnerie en partie basse des murs gouttereaux de la nef, en moellon équarri en moyen appareil, témoigne d’une construction bien antérieure au XVe siècle ; ensuite, ces murs étaient autrefois percés de fenêtres hautes – des fentes de jour verticales comparables à celles du chœur, dotées d'une embrasure intérieure assez large ; enfin, la grande arcade ouvrant le chœur sur la nef, avec ses piliers rectangulaires autrefois redoublés côté nef et côté chœur par des colonnes nichées dans l'angle, avec son bandeau d'imposte à décor d'oves ou de billettes des XIe-XIIe siècles continu sur tout le pourtour des piliers et avec son arc doubleau brisé, atteste que l'espace du chœur ouvrait dès l'origine directement et largement sur une nef par cette composition architecturale grandiose.
À partir de 1317, à la création de l’évêché de Sarlat, la paroisse est comprise dans l’archiprêtré d’Audrix. Il semblerait que l’église ait été alors placée sous le vocable de Saint-Jean-Baptiste et de Saint-Blaise.
L’église semble avoir été partiellement détruite pendant la guerre de Cent ans. Des travaux ont donc été menés après, vers la fin du XVe siècle, afin de remettre en état le bâtiment, mais aussi de l'embellir. Non seulement les murs gouttereaux de la nef sont réparés, mais c'est aussi à ce moment-là que les voûtes quadripartites sur croisées d'ogive sont réalisées pour la couvrir, travaux qui ont entraîné le murage des anciennes baies tandis que de nouvelles – des lancettes à remplages flamboyants – sont percées au centre de chacune des croisées d'ogive ; pour contrebuter la poussée des voûtes, d'importants contreforts sont adossés aux murs gouttereaux de la nef à l'extérieur. La grande baie axiale du chœur est réalisée vers la même période. Enfin, il faut probablement rattacher à cette campagne la création du clocher-mur occidental, avec son portail à bases prismatiques multiples, ses moulures à listel dans l'ébrasement et ses voussures en arc brisé, de même que les moulures hautes, en larmier à listel, qui soulignent la base des baies campanaires. La chapelle seigneuriale au sud du chœur a également été construite à ce moment-là ou peu après, par la famille Bonald alors coseigneur de Campagne. Elle présentait une porte d’entrée particulière depuis le bourg (remaniée depuis).
Une sentence arbitrale du 3 mai 1617 en exécution des sentences des 22 août 1601 et 7 juin 1603, nous donne des précisions sur la construction des chapelles. À cette date, seule existe la grande chapelle des Bonald au sud du chœur (l’actuelle sacristie), qui appartenait alors, en ce début du XVIIe siècle, à la famille des La Barthe. Cette sentence arbitrale autorise les deux autres co-seigneurs, Jean de La Borie et Gaspard de Calvimont, à construire une chapelle chacun. Il est spécifié que les deux chapelles ne doivent pas excéder en dimensions la chapelle des La Barthe. Les deux chapelles latérales, de part et d’autre du transept, sont donc construites après, elles sont de même dimension et font chacune moins de la moitié de la chapelle des La Barthe. La chapelle située au nord appartenait probablement à la famille de Calvimont de Chabans, puisqu'elle donnait sur leur jardin. La famille de La Borie possédait quant à elle la petite chapelle construite au sud.
Tout au long du XIXe siècle, l’église paroissiale de Campagne fait l’objet de nombreux travaux de réparation et d’entretien, financés par la commune de Campagne mais également par celle de Saint-Cirq, rattachée pour le culte à partir de 1801 (elle demandera d’en être détachée en 1842). En 1827, la grande porte en menuiserie menant du chœur à la grande chapelle sud est ainsi refaite en bois de noyer. Dès 1839, des travaux sont entrepris sur le clocher par Tardieu, sur la maçonnerie et le pavement par Maurin, sur la charpente par Martiel Veyssière et sur la toiture par Lesperance et Manet. Lors de ces interventions, les piliers de bois qui soutenaient la charpente du clocher sont remplacés par des piles en "quartelage" (quartiers de pierre de taille) de deux pieds carrés et de sept pieds de haut. D’autres travaux sont nécessaires à partir de 1845 : le clocher est rénové en 1848 par Mathieu Roussy, taillandier, et Guillain Gany, charpentier, puis la charpente est descendue et refaite, de même que la toiture, en 1849. Il semblerait que le pavement ait aussi été refait et les murs blanchis. Les interventions se poursuivent, en 1850 sur la cloche et en 1851 sur l’église. Le 27 mai 1852, un conseil de fabrique est mis en place à Campagne, jusqu’en 1907.
Le haut taux d’humidité dans l’église multiplie la cadence des travaux dans les décennies suivantes : l’église est décrite dès 1885 dans un état d’humidité et de malpropreté important, causé par son manque d’ouvertures et par sa situation en contrebas, d’au moins deux mètres, des terrains et de la route qui la dominent et l’enclavent. Un constat de délabrement et d’insalubrité est également dressé en 1886 par l’abbé Lescure, curé doyen du Bugue. Cette situation a provoqué le développement de moisissures verdâtres sur les murs. De nombreux travaux doivent être entrepris : le creusement d’un fossé d’assainissement, l’ouverture de fenêtres, la réfection de la toiture, la reprise du pavé, la construction d’une tribune pour augmenter la capacité d’accueil et la construction d’une sacristie, indispensable pour ranger les livres, ornements et mobiliers qui se détériorent rapidement avec l’humidité. Un fossé est ainsi creusé du côté nord et est de l’église et un mur de soutènement est construit par Aublaut, architecte diocésain, en 1887. Des travaux de réparation et d’entretien ont ensuite régulièrement lieux, par exemple en 1897 et en 1902, après qu’un orage ait endommagé l’église.
L’église paroissiale de Campagne a failli être détruite en 1875-1876. Le maire de l’époque, le marquis Raoul de Campagne, propose de construire un nouvel édifice pour remplacer l’église dépeinte comme humide, insalubre, mal placée, mal conçue et trop petite. Il offre un emplacement, situé à la sortie du bourg en direction du Bugue, et la somme de 20 000 francs pour la nouvelle construction. Il demande en retour que la commune lui cède l’ancienne église qu’il prévoit de détruire en partie et de ne conserver que le chœur et la chapelle des marquis pour les intégrer au parc du château. Des plans sont dressés pour la nouvelle église envisagée, dans un style néo-roman. Ce projet n’est finalement pas réalisé, et en 1882 la construction d’un nouvel édifice est de nouveau proposée par le conseil de fabrique, qui cette fois-ci encore n’aboutit pas.
Le 22 août 1949, l’église paroissiale de Campagne est inscrite au titre des monuments historiques.
En 1983-1984, l’église de Campagne subit de grands travaux. Toute la toiture de l’église est d’abord reprise et refaite en 1983, que ce soit celle du chœur, de la sacristie, de la nef ou celles des chapelles. Les tuiles sont déposées et la charpente reprise avant que la couverture ne soit réinstallée. Des travaux sur la maçonnerie sont également effectués : un terrassement a été fait sur les côtés et une fenêtre a été réalisée en maçonnerie de moellon dans la porte accédant au domaine du château.
Une nouvelle campagne de restauration de l’église a été lancée en 2018, en trois phases.
Détail de l'historique
Périodes |
Principale : 4e quart 11e siècle, 1er quart 12e siècle (incertitude) Secondaire : 4e quart 15e siècle Secondaire : 1er quart 17e siècle Secondaire : 2e quart 19e siècle Secondaire : 4e quart 19e siècle Secondaire : 4e quart 20e siècle |
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Description
L’église paroissiale Saint-Jean-Baptiste de Campagne se trouve au centre du bourg, entre la place principale et le château, et en face du lavoir. Auparavant se déployait un cimetière tout autour, disparu sous la route et les aménagements du bourg. L’emplacement du cimetière a été déplacé dans le bourg, en surplomb et le long de la route départementale menant au Bugue.
Elle présente une nef unique en plan barlong prolongée par un avant-chœur ouvrant sur deux chapelles latérales au nord et au sud formant un faux-transept. Le chœur à chevet plat est situé dans la continuité de la nef et de l’avant-chœur, en hauteur ; il est accessible par quelques marches. Il ouvre au sud sur la sacristie, ancienne chapelle des seigneurs de Campagne. Une litre funéraire court tout le long de la nef, des chapelles et du chœur, à l’intérieur et à l’extérieur de l’église. Très abimée, elle laisse encore deviner par endroit des armoiries, notamment celle des La Borie de Campagne sur le mur nord à l’extérieur.
La façade de cette église romane se compose d’un portail en arc brisé avec quatre voussures prismatiques, surmonté d’une lancette, le tout sommé d’un clocher-mur percé de trois baies campanaires. Deux cloches occupent deux de ces baies, l’une datée de 1626 et l’autre de 1822.
La nef est voûtée sur croisées d’ogive et mesure 20,66 mètres de long sur 4,66 mètres de large. Elle est éclairée par six baies, trois sur le mur nord et trois sur le mur sud, et une lancette au-dessus du portail d’entrée. L’emplacement des baies n’est pas d’origine ; d’anciennes ouvertures ont en effet été comblées et des baies rouvertes de façon à être centrées sur les croisées d’ogive. Des traces d’un ancien escalier à côté de l’entrée indiquent la présence de l'ancienne tribune.
Deux chapelles latérales de part et d’autre de l’avant-chœur forment un faux-transept. Chacune présente le même plan de forme rectangulaire, une voûte sur croisées d'ogive, et la même disposition avec l’autel placé contre le mur est. Chacune est éclairée par un vitrail, un oculus représentant saint Jean-Baptiste dans la chapelle au nord et une baie figurant la Vierge dans la chapelle au sud.
Le chœur est de forme rectangulaire et présente des contreforts plats à l’extérieur comme à l’intérieur. Il est voûté d’une coupole sur trompe à l’origine octogonale puis refaite de forme ovoïde. Elle est éclairée par une grande baie sur le mur est, ouverte en modifiant le contrefort, et deux lancettes étroites l’encadrant, ainsi que par une baie dans le mur nord.
Dans le mur sud du chœur a été ouverte une grande porte menant à l’ancienne chapelle seigneuriale, aujourd’hui reconvertie en sacristie. Cette sacristie présente un plan rectangulaire et deux voûtes sur croisée d’ogive avec liernes et tiercerons, reposant sur des consoles à décor floral et figuré. Les tombeaux des seigneurs de Campagne y ont été placés depuis le XVe siècle.
Détail de la description
Murs |
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Toits |
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Plans |
plan allongé |
Étages |
1 vaisseau |
Couvrements |
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Couvertures |
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Typologie |
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Décors/Technique |
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Décors/Représentation |
Précision sur la représentation : Litre funéraire en partie effacée. Chapiteaux romans à motifs géométriques. Consoles à décor végétal. |
Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier d'oeuvre architecture |
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Référence du dossier |
IA24002088 |
Dossier réalisé par |
Pagazani Xavier
Girard Fanny |
Cadre d'étude |
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Aire d'étude |
Vallée de la Vézère |
Phase |
étudié |
Date d'enquête |
2011 |
Copyrights |
(c) Conseil départemental de la Dordogne, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel |
Citer ce contenu |
Église paroissiale Saint-Jean-Baptiste, Dossier réalisé par Pagazani Xavier, (c) Conseil départemental de la Dordogne, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/7bf413f1-a138-428f-8596-674c56725eb8 |
Titre courant |
Église paroissiale Saint-Jean-Baptiste |
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Dénomination |
église paroissiale |
Vocable |
Saint-Jean-Baptiste |
Parties constituantes |
Chapelle seigneuriale et funéraire de la famille de Bonald puis de la famille de La Barthe, actuelle sacristie |
Statut |
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Protection |
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Intérêt |
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Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Dordogne , Campagne
Milieu d'implantation: en village
Lieu-dit/quartier: Bourg
Cadastre: 2021 A 707, 1817 A 973