L'architecture régionaliste néo-basque à Bidart
Vidéo
Publiée le 28 août 2023
# Pyrénées Atlantiques, Bidart
# Opération d'inventaire : Bidart
# Villa, mairie, école
# Du 19e au 20e siècle
A la fin du 19e siècle s’est développée un peu partout en France une mouvance architecturale régionaliste visant à revisiter les grands principes des constructions traditionnelles locales en les combinant aux exigences et besoins de la vie moderne. C’est dans le cadre de ce mouvement qu’est né le style néo-basque, inspiré des anciennes maisons traditionnelles du Labourd. La première construction de ce type a été la villa Toki Eder vers 1896 à Biarritz. Bâtie dix ans plus tard, la villa Arnaga, demeure d’Edmond Rostand à Cambo les Bains fait office de manifeste du genre.
A Bidart, c’est l’architecte Louis Gomez qui a introduit ce style nouveau, en 1910, avec la villa Mendi Gaïna. Sur la base d’une maison en pierre du début du 19e siècle, il a créé une surélévation en faux pan de bois, a recouvert le bâtiment d’une toiture asymétrique débordante et a ajouté des balcons. Plus tard, l’architecte Charles Siclis a construit une deuxième maison reliée à la première par une double galerie pour former une grande et luxueuse villa.
L’ensemble a disparu mais il reste aujourd’hui l’élégante conciergerie du domaine, également bâtie dans le style néo-basque, avec ses toits débordants et la pierre de taille soulignant les encadrements des ouvertures.
Les villas Péléenia en 1911, Etche Spi en 1913 et Ttalienia en 1914 s’inscrivent également dans le début de cette mouvance architecturale Néo-basque de Bidart. Elle se caractérise par l’asymétrie des constructions, coiffées par des toitures débordantes portées par des chevrons. Les ouvertures sont de formes diverses et disposées de manière non symétrique pour générer une forme de fantaisie, tout comme les décors sculptés et moulurations qui viennent orner les façades. Les étages comportent des faux pans de bois en béton peint, des parties en encorbellement, ainsi que des balcons. Les façades sont enduites en blanc, à l’exception des belles pierres de taille qui encadrent les ouvertures.
Si d’extérieur ce style se rattache à la tradition et au passé, l’agencement intérieur est totalement adapté à la vie moderne et mondaine de cette époque, avec de vastes halls d’entrée distribuant les grandes pièces de réception au rez-de-chaussée et de larges cages d’escalier couronnées de galeries desservant les chambres à l’étage. Les cheminées sont souvent ornées de décors raffinés.
En accord avec ce mode de vie des années folles, les villas étaient entourées de jardins soigneusement agencés pour la promenade, la contemplation du paysage et l’organisation d’événements festifs. Ils étaient équipés d’une allée d’accès pour les automobiles, marqueur indispensable de richesse. L’entreprise horticole locale des frères Gélos a dessiné et aménagé de très nombreux espaces paysagers pour entourer les villas et hôtels de Bidart, selon des programmes allant des plus modestes avec de simples parterre de fleurs et d’arbustes aux plus somptueux avec pergolas, petits bassins, boulingrin, fronton, terrain de tennis. Ces jardins aujourd’hui très modifiés ne reflètent plus que de manière lointaine leur splendeur passée.
Après la première Guerre Mondiale, une quarantaine de villas d’architecture néo-basque ont été construites à Bidart. L’architecte Henri Rateau, ancien géomètre installé à Bidart en 1924, fut l’auteur de nombre d’entre elles, comme la conciergerie de la villa Uhaldia. Il a également réalisé des édifices publics dans ce même style, comme la très belle école communale de 1932, qui répondait à toutes les exigences de l’époque avec un bâtiment pour les filles et un pour les garçons, le tout derrière une harmonieuse façade néo-basque, ou encore la mairie. Sur celle-ci, il a utilisé de la pierre de la Rhune, d’une teinte légèrement rosée, pour les 4 colonnes du porche et les encadrements des ouvertures du rez-de-chaussée, avec des motifs sculptés et des dates portées. La cheminée de la salle des mariages est aussi en pierre de la Rhune, sous un plafond orné de fausses poutres qui évoquent le style traditionnel. Parquet et boiseries s’harmonisent avec cet esprit de faux ancien, tout comme les balcons de l’étage et les faux pans de bois.
Henri Rateau a également conçu les bâtiments du préventorium Maurice Pierre, avec un pavillon central totalement marqué par son style architectural de prédilection, qu’il a par la suite largement contribué à démocratiser en l’utilisant pour des maisons plus modestes. Au cours des 4 dernières années de son existence, entre 1947 et 1951, il a multiplié les constructions, avec pas moins de 17 projets sur la commune.
Pour sa part, l’architecte Henri Godbarge a théorisé l’architecture néo-basque en 1931 dans un ouvrage qu’il a consacré aux évolutions de l’art basque.
Dans la deuxième moitié du 20e siècle, le style néo-basque s’est généralisé tout en se standardisant. La diversité architecturale s’en est retrouvée appauvrie, surtout dans les nouveaux lotissements où l’uniformité a pris le pas sur la singularité.