Bacs et passages d'eau sur la Charente

France > Nouvelle-Aquitaine

Des passages attestés dès le Moyen Age

Des fouilles subaquatiques, effectuées depuis les années 1980, ont permis de découvrir des épaves qui montrent que les traversées existent depuis au moins le Haut Moyen Age. Le fonctionnement de bacs sur la Charente est attesté dans les archives à la fin du Moyen Age. Ils semblent se situer auprès d'anciens passages à gué qu'ils remplacent. Les droits en sont détenus par des communautés ecclésiastiques ou des seigneurs. Les sources sont plus abondantes pour les périodes moderne et contemporaine ; ainsi, le passage d'eau de Chaniers est-il par exemple cité dans l'atlas terrier de la seigneurie de Chaniers établi entre 1614 et 1660. Les 23 passages d'eau étudiés n'ont pas tous été exploités en même temps.

La carte du cours de la Charente depuis Verteuil, datée de 1689, indique un passage d'eau à Port-du-Lys, entre Dompierre et Saint-Sever, Chaniers et Courcoury, Saint-Vaize et Port-de-la-Croix, à l'Hôpital, Tonnay-Charente, Martrou, Soubise et en aval de Fort-Lupin. A cette époque, seuls deux ponts permettent le franchissement du fleuve, à Saintes et Taillebourg. Le pont, attesté par des sources au Moyen Age à Tonnay-Charente, n'existait plus à cette époque.

Les cartes levées par Claude Masse au début du 18e siècle, plus précises, mentionnent pour la partie aval du fleuve, un passage d'eau par bac à Saint-Savinien, l'Hôpitau, Carillon, Tonnay-Charente, et, pour l'estuaire, Martrou, Soubise, ainsi qu'en aval du Fort-Lupin.

Jusqu'à la Révolution, le droit de bac est de nature féodale ou de souveraineté. Comme droit féodal, il est aboli par les lois du 28 mars 1790 et 25 août 1792, et la loi du 6 frimaire an VII (26 novembre 1798) attribue au gouvernement le droit exclusif d'établir, à l'usage du public, des bacs et passages d'eau, d'en fixer et percevoir les tarifs et revenus, d'en déterminer le nombre et la situation. Les anciens propriétaires de bacs sont dédommagés.

Après l'adoption de la loi, le sieur Ravet est le premier fermier général des bacs et bateaux de passage du département de la Charente-Inférieure retenu par adjudication, en 1804, pour une durée de 6 années. Il sous-afferme les différents passages. A chaque succession de fermier est établi un acte, réalisé par un expert nommé par l'administration et un expert choisi par le fermier sortant, afin de dresser l'état descriptif et estimatif des bacs, bateaux et agrès mis à la disposition du nouvel adjudicataire, et qui devront être rendus par lui dans l'état où il les trouve.

En 1839, dans son ouvrage Statistique du département de la Charente-Inférieure, Gautier énumère et décrit l'équipement de 14 passages d'eau sur la Charente. La plupart sont équipés de trois bateaux : un gabarot, un gaillon et un batelet. Le gabarot est parfois appelé "passe-cheval". Les affermages annuels sont détaillés et, calculés sur le rapport de chaque passage, montrent l'importance des uns et le peu de fréquentation des autres.

A partir des années 1830, les passages d'eau vont peu à peu être remplacés par des ponts : celui de Carillon (sur la Boutonne) en 1837, de Tonnay-Charente en 1842... Par la loi du 10 août 1871, l'entretien des bacs, qui desservent les routes et chemins à la charge des départements, cesse d'être supporté par l'Etat et incombe aux départements.

L'estuaire est soumis à l'inscription maritime, dès lors, les passages d'eau qui y sont situés sont considérés comme une navigation maritime. Un décret de 1852 leur impose un rôle d'équipage, et les hommes sont choisis parmi les inscrits maritimes. Jusqu'à la construction du pont transbordeur du Martrou, seuls les passages à bac de Martrou et de Soubise permettent la communication entre la rive gauche et la rive droite de l'estuaire en aval de Tonnay-Charente. Les jours de marché à Rochefort, l'affluence de passagers et de marchandises occasionne des encombrements lents à se résorber. Ces passages sont réputés être dangereux lors des tempêtes. Ils sont dotés d'un remorqueur à vapeur aux environs de 1855. Un passage d'eau est établi entre Port-des-Barques et Fouras, auprès du fort La Pointe, en 1904.

Après l'aménagement de la ligne ferroviaire entre Rochefort et Cognac, les bacs sont utilisés par les voyageurs qui souhaitent accéder à une gare située de l'autre côté du cours d'eau. Plus couramment, les passages d'eau servent aux agriculteurs riverains pour accéder aux prairies qu'ils exploitent sur les rives du fleuve. En été, au moins jusqu'en 1950, le bac de Chaniers est ainsi réservé pendant quelques jours aux propriétaires des prairies situées dans l'île de la Baine pour la sortie de leur récolte.

Le fonctionnement des bacs

En 1876, l'inventaire du passage de Port-Tublé mentionne l'existence d'une chaîne traversant la Charente pour la manoeuvre du bac. C'est la seule source qui fait référence à ce système dit à câble ou à chaîne,qui, amélioré, est encore adopté par les bacs de Chaniers et de Dompierre. Un câble, tendu entre les deux rives, maintient le bac dans la bonne direction, il repose sur le fond lorsque le bateau est à l'arrêt. Il est doublé par une chaîne immergée qui permet d'avancer grâce à une roue dentée actionnée par une manivelle. Les bacs de Chaniers et de Dompierre sont manoeuvrés manuellement pour l'un et avec l'assistance d'un moteur pour l'autre. Il semble que le système « à traille », celui où le câble est tendu en hauteur entre des mâts, n'existe pas sur la Charente. En aval de Saint-Savinien, les bacs semblent avoir toujours été manoeuvrés à la seule aide de rames et de perches ferrées.

D'après un relevé des canaux et fossés réalisé en 1808 par l'ingénieur Guérinot, la plupart des passages ont leur chaussée d'accès bordée par un fossé qui permet d'accéder au bac même durant les périodes de crues. La cale d'embarquement, dénommée "grave", est empierrée.

Le cahier des charges imposé aux fermiers des passages d'eau est très strict. Il concerne l'entretien du matériel, les règles de sécurité à respecter et l'aptitude des passeurs, appelés aussi mariniers. Les procès-verbaux de visite semestrielle, qui sont dressés pour vérifier que les diverses prescriptions sont bien observées, fournissent de nombreuses informations sur le fonctionnement du service.

Un abri est généralement prévu pour le passeur sur l'une des rives. En 1934, un abri de brande et de chaume, construit sur la rive droite par l'un de ses prédécesseurs, est utilisé par le fermier du passage de la Grande-Porte à Bussac-sur-Charente. Les abris actuellement utilisés pour les bacs de Chaniers et de Dompierre-sur-Charente datent des années 1960.

Actuellement, durant la période estivale, la traversée de la Charente est encore assurée par des bacs à trois endroits, dans l'estuaire entre Rochefort et Soubise et, beaucoup plus en amont, entre Chaniers et Courcoury d'une part, et Rouffiac et Dompierre-sur-Charente de l'autre.

Les bacs

En 1839, M. Dumontet, de Saintes, est retenu comme adjudicataire pour les travaux d'établissement d'un passage d'eau de Portublé à Chaniers, et pour la construction de trois bateaux en chêne, de 15, 10 et 5 mètres de long, équipés de chaînes, gouvernails et perches. Les deux premiers sont nommés gabarots, dits respectivement grand et petit, le troisième est appelé batelet. Les deux premiers sont dotés de tillacs (planchers) et leurs quatre angles sont armés d'équerres de fer ; le premier fait 3,50 mètres au centre et 2,80 mètres aux extrémités, le deuxième 2,50 mètres au milieu et 2 mètres à chaque bout. Le dernier mesure 1,33 mètre de large au milieu et 1 mètre à chaque extrémité.

Les derniers bateaux construits et réparés dans la vallée semblent être les bacs. Une photographie montre ainsi un bac en cours de restauration au port de Martrou à Echillais vers 1900. A partir du début du 20e siècle, les bacs en bois en mauvais état sont remplacés pour certains par de nouveaux en tôle ; la Société Guimard frères de Saintes construit un tel bac pour le passage de Chaniers dans les années 1920. Des coques en béton armé remplacent aussi le bois dans ces mêmes années.

Périodes

Principale : Fin du Moyen Age, Temps modernes, 19e siècle, 20e siècle

<body><line/>En général, une cale maçonnée, faisant suite au chemin qui la dessert, est aménagée de part et d'autre de la Charente, pour permettre l'embarquement et le débarquement des personnes et des marchandises. Ces cales, dotées d'une ou deux amarres, sont perpendiculaires au lit du fleuve. Elles ne sont généralement plus visibles, recouvertes de vase et de végétation. Dans le cas du passage d'eau de Brives-sur-Charente, des blocs de pierre, installés de manière à servir de quai, sont encore en place. Plusieurs passages ont conservé le fossé adjacent, qui permettait l'usage du bac même en période de crues.<line/><line/>Les abris destinés aux passeurs ont disparu, hormis ceux des passages de Chaniers et de Dompierre encore en activité durant la période estivale. </body>

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