Cette correspondance fournit de précieux renseignements sur le déroulement des travaux et les choix, bien souvent motivés par le coût, qu’ils engendrent. Ainsi, des deux pavillons qui devaient venir encadrer la chartreuse d’origine, seul le pavillon sud est réalisé. Quant à la proposition de développer ce pavillon sur deux étages, elle est finalement écartée pour revenir plus raisonnablement à un unique étage.
Pour le choix des matériaux, c’est encore l’économie qui gouverne, qualité et esthétique étant reléguées au second plan : couverture en tuile ou en ardoise, maçonneries en moellon ou en pierre de taille de Bourg, escalier en chêne ou en pierre, carreaux en ardoise ou en pierre de Caen, le prix est presque systématiquement le critère décisif.
Concernant la décoration, le goût et les exigences du commanditaire sont largement imposés au maître d’ouvrage :"je suis décidé à faire mettre une galerie à l’italienne" (balustrade d’attique) ; "pour les trumeaux [des cheminées], je mettrai des glaces […], les trumeaux de peinture me semblent de mauvais goût" ; "pour le vestibule, il faut des couleurs douces et claires" : autant de préconisations que l’architecte a peu de latitude à discuter.
Cette documentation nous éclaire également sur les conditions de travail et de réalisation d’un tel chantier notamment les questions concernant l’approvisionnement et le transport des matériaux, la qualification parfois insuffisante des ouvriers ou encore les retards dans l’avancement des travaux… Une indication qui pourrait sembler anecdotique démontre toute la complexité d’un chantier au début du 19e siècle et toute l’ingéniosité dont l’architecte doit faire preuve : lorsqu’il s’agit de réaliser la charpente et la toiture du nouveau pavillon, il propose de "récupérer du bois de la charpente actuelle pour la nouvelle, mais il faudrait alors que le corps de logis reste découvert pendant un temps, et s’il pleuvait les plafonds seraient dégradés. On pourrait louer des voiles de bateau pour faire une couverture provisoire".
Le château a conservé jusqu’à nous jours l’aspect que le comte d’Aux et l’architecte Durand ont conçu et affiné au cours de leurs échanges épistolaires. La confrontation de ces documents d’archive et de l’analyse architecturale permet donc une compréhension particulièrement fine de cet édifice.
Merci à Iseut l'Huillier, élève à l’Ecole nationale des Chartes (Paris) et stagiaire au service de l’Inventaire au mois de septembre, qui a analysé la correspondance d’Aux/Durand.