Les peintures de la Vallée des Fresques : la chapelle Sainte-Catherine de l'église d'Antigny, l'Enfance du Christ
La chapelle Sainte-Catherine de l'église d'Antigny est entièrement couverte de peintures murales de la fin du 15e - début du 16e siècle. Elles abordent trois grands thèmes dont nous vous proposons de découvrir le premier, consacré à l'Enfance du Christ.
Carnet du patrimoine
Publié le 25 avril 2018
# Vienne, Antigny
# Opération d'inventaire : Vallée de la Gartempe
# Peinture monumentale
# Limite 15e siècle 16e siècle
Une chapelle entièrement peinte...
La chapelle Sainte-Catherine a été construite au sud du chœur de l'église Notre-Dame d'Antigny, en 1421, par Renaud de Montléon, seigneur de Boismorand. Elle est couverte de peintures murales probablement commanditées par Louis de Moussy, fils de Jean de Moussy (vers 1433-1510). Il s'agit de la dernière des chapelles peintes dans l'entourage des de Moussy, après la chapelle funéraire dans le bourg de Jouhet et la chapelle du château de Boismorand. Cet ensemble de peintures daterait ainsi des dernières années du 15e siècle ou du tout début du 16e siècle. Les armoiries de la famille de Moussy, d’or au chef de gueules chargé d’un lion passant d’argent, sont peintes plusieurs fois dans la chapelle. L'église d'Antigny a été classée comme Monument historique sur la liste 1913 et les peintures murales de la chapelle ont été restaurées en 1986.
... sur trois thèmes
Les peintures s'organisent sur deux registres sur la voûte de la chapelle, ainsi que sur les murs et un pilier. Les thèmes abordés peuvent être regroupés en trois ensembles : l’Enfance du Christ, la Passion du Christ et le Jugement dernier, dans lequel peut être inclut le Dit des trois vifs et des trois morts, déjà présenté.
Des phylactères (banderoles) portent des inscriptions en latin qui expliquent certaines scènes. Celles-ci sont présentées dans des cases au cadre peint en couleur ocre. Les pigments sont différents de ceux utilisés dans les chapelles de Jouhet et de Boismorand, et ici, les couleurs n'ont pas viré dans le temps.
Le dessin est plus simple que dans les deux autres chapelles, il est ainsi difficile de reconnaître des moutons dans les animaux présents dans la scène de l'Annonce aux bergers. La mode vestimentaire a évolué en une génération, les chaussures ont désormais un bout rond et les pourpoints se sont allongés.
Le cycle de l'Enfance du Christ
Le cycle de l'Enfance du Christ est représenté sur le registre supérieur du côté sud de la voûte et se lit de la gauche vers la droite avec successivement l'Annonciation, la Nativité, l'Annonce aux bergers, l'Adoration des mages et le Massacre des Innocents, qui se prolonge sur le mur ouest de la chapelle.
L'Annonciation
Dans la scène de l'Annonciation, l'ange Gabriel tient un long phylactère dont l'inscription n'est plus lisible.
La Nativité
La scène de la Nativité est représentée avec une crèche placée sous un hangar ; un linge blanc, évoquant à la fois le lange et le linceul du Christ, est accroché à une poutre. Comme à Jouhet, Joseph porte un long manteau à capuche et un bâton de marche. La Vierge et Joseph ont les mains jointes en signe d'adoration devant l'Enfant, dont le corps est entouré de rayons. À la différence de Jouhet, l'Enfant ici n'est pas emmailloté.
L'Annonce aux bergers
La scène de l'Annonce aux bergers présente l'ange Gabriel tenant un phylactère qui porte l'inscription de ses paroles « ANNUNTIO VOBIS GAUDIUM MAGNUM » [Je vous annonce une grande joie]. Les bergers, chaudement vêtus, jouent de la musique : tambour pour le berger à gauche de la scène, cornemuse et trompe droite (ou hautbois) pour ceux de droite.
L'Adoration des mages
Dans la scène de l'Adoration des mages, les rois mages, guidés par l'étoile désignée par le second d'entre eux, apportent leurs présents à Marie qui porte l'Enfant Jésus dans ses bras ; Joseph se tient en retrait derrière elle. Les coiffures des rois mages varient : le premier est chauve et nu-tête, le second est coiffé d'un turban et le troisième (Balthazar, reconnaissable à sa peau noire) porte une couronne.
Le Massacre des Innocents
La scène du Massacre des Innocents présente le roi Hérode siégeant sur son trône et tenant un sceptre surmonté d'une fleur de lys. Il donne ses ordres à un officier tandis que le massacre commence : l'artiste a figuré les sang s'échappant du corps de trois enfants ; l'un d'entre eux est encore tenu dans les bras de sa mère. Une autre mère est représentée sur le mur ouest, dans le prolongement de la scène.
Le Massacre des Innocents n'est pas représenté dans les chapelles de Jouhet et de Boismorand, mais elle est présente dans l'art roman et le début de l'art gothique du Poitou et des Charentes, (par exemple sur le portail de l'abbaye aux Dames à Saintes ou sur le portail du mur nord de la cathédrale Saint-Pierre à Poitiers) et dans d'autres églises au 15e siècle, par exemple dans la chapelle Notre-Dame-des-Rosiers à Saint-Clémentin dans les Deux-Sèvres.
À gauche de la scène, Hérode semble siéger sur son trône, il tient un sceptre surmonté d'une fleur de lys. Il donne ses ordres à un officier tandis que le massacre commence : l'artiste a figuré les sang s'échappant du corps de trois enfants ; l'un d'entre eux est encore tenu dans les bras de sa mère ; celui représenté en haut à droite de la scène est tué devant sa mère, dont le corps se prolonge sur le mur ouest.
Références documentaires
- Angheben, Marcello, Favreau, Robert, Landry-Delcroix, Claudine, Riou, Yves-Jean. La vallée des fresques de Saint-Savin à Montmorillon. Association Gilbert de la Porée, 2011, p. p. 81-87 ;et 103-112.
- Landry-Delcroix Claudine, Amelot Jean-François (photographe). La peinture murale gothique en Poitou. Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 2012, notamment p. 77-80, 159-164 et 230-233.
- Salvini, Joseph. "Les ensembles décoratifs dans le diocèse de Poitiers entre la guerre de Cent Ans et les guerres de Religion". Bulletins de la société des Antiquaires de l'Ouest, 3e série, tome 12, 1939-1941, p. 97-105 et 116-120.
Auteur : Véronique Dujardin