Les peintures de la Vallée des Fresques : la chapelle Sainte-Catherine de l'église d'Antigny, le Jugement dernier
Dans un contexte d'épidémies et de peste, le chrétien du Moyen Âge est appelé à se tenir prêt à affronter la mort en toute circonstance. Dans la chapelle Sainte-Catherine de l'église d'Antigny, ce message est porté par les représentations du Jugement dernier, de l'Enfer, du Christ en gloire, des saints intercesseurs et le Dit des trois morts et des trois vifs.
Carnet du patrimoine
Publié le 4 juin 2018
# Vienne, Antigny
# Opération d'inventaire : Vallée de la Gartempe
# Peinture monumentale
# 14e siècle
Ces thèmes sont représentés dans les trois chapelles dédiées à Sainte-Catherine peintes par les seigneurs de Boismorand et leur entourage : la chapelle de Jouhet dont les peintures ont probablement été commandées vers 1476 par Pierre du Boschage, curé de la paroisse de Jouhet pour Jean de Moussy (vers 1433-1510), qui a fait réaliser la chapelle du château de Boismorand entre 1475 et 1480 à Antigny ; la chapelle de l'église Notre-Dame à Antigny aurait été quant à elle peinte vers 1500 par son fils, Pierre de Moussy (décédé en 1510).
Dans l'église Notre-Dame d'Antigny, le Jugement dernier et l'Enfer ont été représentés au revers de la façade au 14e siècle ; les artistes qui ont peint la chapelle avaient donc un exemple à proximité immédiate.
Le Jugement dernier
La scène du Jugement dernier est peinte sur la retombée nord de la voûte de la chapelle. Comme à Boismorand et à Jouhet, la scène s'organise autour d'une grande représentation du Christ, représenté assis sur son trône, nu sous son manteau, exposant ses plaies. Il est frappé par l'Esprit saint, représenté ici par une épée et des rayons. Il est encadré par la Vierge, présentée seins nus comme dans les deux autres peintures, et saint Jean, tous deux agenouillés. Une foule de saints personnages se pressent au second plan.
Le Christ accueille ainsi les âmes, petits personnages nus qui s'échappent des cercueils placés sous ses pieds, au son des trompettes sonnées par les anges placés l'un au-dessus de l'église associée au cimetière, l'autre tout en haut à droite de la scène.
La scène du Pèsement des âmes, en revanche, ne se trouve ni à Jouhet, ni à Boismorand, ni dans la nef voisine de l'église Notre-Dame. Un ange procède à la pesée de deux âmes tandis que deux autres patientes. En haut à gauche de la scène, au-dessus des représentations de l'Enfer, saint Pierre accueille quatre Élus au Paradis dont il tient la grande clef de la main droite.
L'Enfer
La scène de l'Enfer occupe l'intégralité des trois faces du contrefort situé au centre du mur nord et se prolonge sur la partie droite de ce mur. Les Damnés subissent les supplices : ils sont précipités dans les flammes, ébouillantés dans un chaudron, passées sur le gril ; des femmes sont outragées par des diables sur les faces est et ouest du pilier.
La Gloire du Christ
Comme dans les deux autres chapelles, le Christ en Gloire, couronné et assis sur son trône, entouré du Tétramorphe (symbole des quatre apôtres), occupe une place privilégiée, à l'extrémité est de la voûte, au-dessus de l'autel - aujourd'hui disparu, mais dont on devine la place par l'absence de peinture. Le décor peint sur le mur oriental souligne la fenêtre de faux claveaux ; sous celle-ci se trouvent un Christ en croix entouré de saints personnages qui évoquent de petites statues associées à un retable, et un décor de fausse tenture court sur les côtés de l'autel, se prolongeant sur le registre médian du mur sud.
Les saints personnages et le donateur
Contrairement à la chapelle de Jouhet, peu de saints personnages isolés, intercesseurs auprès du Christ, sont représentés dans la chapelle d'Antigny. Peut-être étaient-ils représentés sur les deux scènes aujourd'hui illisibles. Seul se distingue désormais un archer qui évoque le martyre de saint Sébastien, peint à cheval sur les murs est et sud de la chapelle.
De même, le donateur ne semble pas s'être représenté, mais les armoiries de la famille de Moussy (d'or au chef de gueules chargé d'un lion passant d'argent) sont peintes à plusieurs reprises dans la chapelle ; un écu est également porté par un homme sauvage, dans une présentation assez fréquente à la Renaissance.
Auteur : Véronique Dujardin
Références documentaires
- Angheben, Marcello, Favreau, Robert, Landry-Delcroix, Claudine, Riou, Yves-Jean. La vallée des fresques de Saint-Savin à Montmorillon. Association Gilbert de la Porée, 2011, p. 81-87 et 103-112.
- Landry-Delcroix Claudine, Amelot Jean-François (photographe). La peinture murale gothique en Poitou. Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 2012, notamment p. 77-80, 159-164 et 230-233.
- Salvini, Joseph. "Les ensembles décoratifs dans le diocèse de Poitiers entre la guerre de Cent Ans et les guerres de Religion". Bulletins de la société des Antiquaires de l'Ouest, 3e série, tome 12, 1939-1941, p. 97-105 et 116-120.