Un chantier-école de restauration des statues du Jardin de Gabriel
En partenariat avec la Région Nouvelle-Aquitaine, deux écoles de restauration de sculpture se sont engagées dans un chantier-école de restauration des statues du Jardin de Gabriel. Ce chantier s’est déroulé sur deux semaines en 2023, l’une en juin avec 16 étudiants, l’autre en septembre avec 10 étudiants.
À la suite d’une étude sur l’état sanitaire du Jardin de Gabriel en 2016, 59 statues qui se trouvaient dans un état de détérioration avancé ont été mises à l’abri, en attendant une restauration. En 2022, Marion Benda, étudiante de l’Ecole supérieure d'art et de design (ESAD) TALM-Tours, a réalisé, dans le cadre de son master, la restauration d’une statue de danseuse du Jardin de Gabriel, ce qui lui a permis de dresser un protocole de restauration des statues. En 2023, un chantier-école de restauration a cette fois associé deux écoles : l’Institut National du Patrimoine (INP) et l’ESAD TALM-Tours. L’objectif est à la fois de participer à la sauvegarde du site et de former des restaurateurs du patrimoine. Etalé sur deux semaines, ce chantier a permis de restaurer huit statues, grâce aux efforts et aux compétences des étudiants impliqués dans ce projet, sous le contrôle scientifique de la Conservation régionale des Monuments historiques.
Première semaine du chantier-école : interventions structurelles et restauration formelle
La première semaine de restauration s’est déroulée du 26 au 30 juin, avec la participation de 9 étudiants de l’ESAD et de 7 étudiants de l’INP. Ils ont été encadrés par Julia Becker, professeure, et Delphine Bienvenut, restauratrice. Les étudiants ont eu l’opportunité de réaliser une grande variété d’interventions sur les statues sélectionnées, ce qui leur a permis d’expérimenter de nombreuses techniques adaptées aux problèmes spécifiques identifiés par Manuel Lalanne, conservateur des Monuments historiques à la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Nouvelle-Aquitaine.
Le protocole suit les mêmes étapes que celles déjà réalisées sur la statue de la danseuse restaurée en 2022 par Marion Benda. Ce protocole consiste à restaurer les statues selon le principe de l’illusionnisme, qui vise à restituer l’œuvre dans son état d’origine, tout en assurant une réversibilité des interventions.
La première étape du protocole est le dépoussiérage et le nettoyage minutieux des statues. Cette opération permet d’éliminer les saletés et les particules accumulées au fil du temps. L’élimination des micro-organismes est essentielle. Des techniques appropriées sont utilisées pour supprimer les mousses, lichens et autres dépôts qui peuvent altérer la surface des statues : au scalpel, à la vapeur, au brossage mécanique… Le micro-sablage est également employé pour éliminer les dépôts en projetant des particules abrasives sur la surface de la statue.
Pour la repose des éléments fracturés – tête ou bras – les étudiants ont recours au goujonnage, technique qui consiste à percer un trou dans chacune des parties à recoller, introduire un goujon, appliquer de la colle et enfin laisser sécher l’ensemble.
En s’appuyant sur les nombreuses photographies anciennes conservées, les parties lacunaires des statues ont été restituées, en utilisant une pâte constituée d’un mélange de sable fin, de ciment et d’eau. Les étudiants ont recollé les fragments fracturés avec la colle Hilti 550. Ils ont ensuite comblé les fissures des statues grâce à un mélange constitué également de sable, de ciment et d’eau. Avant le « rebouchage », les armatures métalliques apparentes ont été traitées contre la corrosion qui est l’un des principaux problèmes de conservation de ces œuvres en ciment armé.
Pendant cette première semaine de chantier, les 16 étudiants ont été répartis en binômes et ont ainsi pu réaliser la restauration structurelle et formelle des huit statues.
Seconde semaine du chantier-école : restauration de la polychromie
10 étudiants de l’ESAD TALM Tours ont participé à la seconde semaine du chantier-école, qui s’est déroulée du 11 au 15 septembre. Lors de cette période, les travaux se sont concentrés sur la réintégration de la polychromie des huit sculptures restaurées en juin. Ces travaux suivent encore le protocole appliqué sur la statue de danseuse restaurée en 2022 par Marion Benda.
Cette méthode de réintégration picturale des statues du Jardin de Gabriel repose sur un mélange précis de 50 % de ciment blanc et de 50 % de chaux, auquel sont ajoutés des pigments naturels, synthétiques ou de l'oxyde de fer. Le principe de cette réintégration picturale est de ne traiter que les parties lacunaires de la polychromie, en prenant pour modèle la teinte de la polychromie encore présente sur la statue. Pour la sculpture du corbeau, où la polychromie avait presque entièrement disparu, les photographies anciennes ont permis d’attester la présence d’une couleur monochrome jaune qui a ainsi pu être restituée.
Pour obtenir la bonne couleur, il est nécessaire d’anticiper la réaction chimique qui se produit entre le ciment et la polychromie. Les étudiants utilisent donc une galette de ciment, préparée à l'avance, sur laquelle ils appliquent une teinte plus claire que voulue, afin d’observer la variation de la couleur. De nombreux essais sont nécessaires pour ajuster la couleur et aboutir à la bonne teinte sur le support en ciment. Ils peuvent ensuite appliquer cette couleur au pinceau sur la statue. La dernière étape est le séchage des statues fraîchement colorées, à l’aide d’un sèche-cheveux afin d'accélérer le processus.
À la fin de cette seconde semaine de chantier, la restauration des huit statues était achevée par les étudiants. Un constat d’état avant et après la restauration permettra de documenter tous les travaux effectués. Dans les prochains mois, ces sculptures pourront réintégrer le Jardin de Gabriel, à leur emplacement d’origine défini dans les années 1970 et 1980 par leur créateur, Gabriel Albert. Lors de leur retour, les statues subiront deux derniers traitements : la pulvérisation d’un biocide, à titre préventif pour empêcher la réapparition des mousses et lichens, et un traitement hydrofuge pour renforcer leur résistance aux conditions climatiques.
Tout au long du chantier, les étudiants ont échangé entre eux, ont élaboré des propositions d’interventions qu’ils ont présentées à leurs encadrants et au conservateur des Monuments historiques. Ce chantier-école de restauration leur a également permis de se confronter à une grande variété de cas pratiques et constitue donc une étape importante de leur formation.
Samah Louati
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Jardin de Gabriel : présentation
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Eugène Gabriel Albert, plus couramment appelé Gabriel Albert, est né le 19 octobre 1904 au Pin à Nantillé. Ses parents, Anatole Albert et Marie Gaudin, sont agriculteurs. Gabriel Albert va à l´école peu de temps, de six à dix ans, puis travaille avec ses parents. Très tôt, il est attiré par le modelage et la sculpture ...
Jardin de Gabriel : présentation
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Titre : Jardin de Gabriel : présentation
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Localisation : Charente-Maritime , Nantillé , $result.adressePrincipale
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Date d'enquête : 2009
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Auteur du dossier : Allard Thierry , Ourry Yann
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Copyright : (c) Région Poitou-Charentes, Inventaire du patrimoine culturel
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