Les maisons et les manoirs de Collonges-la-Rouge

France > Nouvelle-Aquitaine > Corrèze > Collonges-la-Rouge

CARACTÈRES HISTORIQUES ET DATATION

La chronologie du corpus des maisons (75) et manoirs (6) repérés sur la commune de Collonges-la-Rouge est comprise entre le 14e siècle et la première moitié du 20e siècle avec une prédominance des édifices datant des 17e et 18e siècles (61%) suivis de près par ceux des 15e et 16e siècles (59%). Les bâtis du 19e siècle (37%) correspondent à des reconstructions in situ et à des constructions nouvelles réalisées à l´occasion de la création, entre 1840 et 1850, de la route départementale n°38 qui traverse la commune d´est en ouest, et au percement, à la même époque, d´une nouvelle voie d´accès au centre-bourg. Sur les 81 maisons et manoirs retenus lors de l´enquête, 45 ont été repérés et 36 ont été étudiés. Le choix de renseigner les repérés a été guidé par l´intérêt patrimonial et la richesse architecturale de ce corpus. De nombreuses dates portées ont été relevées [1626 ; 1711 ; 1734 ; 1759 ; 1769 ; 1788 ; 1789 ; AN II ; 1790 ; 1813 ; 1802 ; 1803 ; 1805 ; 1806 ; 1808 ; 1809 ; 1817 ; 1818 ; 1829 ; 1852 ; 1859 ; 1869 ; 1880 ; 1895 ; 1897 ; 1899 ; 1900 ; 1901 ; 1903 ; 1927 ; 1947 ; MII]. Elles sont majoritairement inscrites sur le linteau des portes ou des baies. Certaines sont ornées d´un cœur et/ou d´étoiles (cf. fig. 1 et 2) ; l´une d´entre elles, dans le faubourg (ou barri) du Faure, est associée à une croix de Malte (cf. fig. 3) ; d´autres sont associées aux initiales du commanditaire. Ces chronogrammes correspondent le plus souvent à des dates de remaniements. Ils sont donc, en l´absence de toute autre forme de sources (écrites ou iconographiques), à considérer comme des marqueurs chronologiques importants dans l´histoire des édifices.

Périodes

Principale : 14e siècle

Principale : 15e siècle

Principale : 16e siècle

Principale : 17e siècle

Principale : 18e siècle

Principale : 19e siècle

Principale : 1ère moitié 20e siècle

1. COMPOSITION D´ENSEMBLE

Les maisons et les manoirs sont majoritairement agglomérés dans le centre-bourg (76,5%) ; 13% se trouvent dans les faubourgs de la Veyrie et du Faure et 9 % dans les écarts (Beauregard, Le Breuil, La Fouillade, Le Chastanet, Puy Boulou et Valège).

1.1 MATÉRIAUX DE GROS ŒUVRE

La commune de Collonges-la-Rouge se situe dans le bassin de Meyssac dont la stratigraphie géologique se compose de trois couches principales : les grès rouges de Brive puis les grès dits de Grammont, de couleur beige, et enfin les grès de Meyssac, d´un rouge très intense. La couleur rouge de ces grès provient du lessivage de ces sols riches en oxyde de fer.

La présence de ce sous-sol en grès rouge pourrait expliquer l´utilisation de ce matériau dans les constructions. Pourtant, le bourg de Collonges-la-Rouge, qui se distingue par l´utilisation quasi exclusive du grès rouge, est implanté sur un banc de calcaire. Il semble donc que le choix du grès rouge ait été plutôt guidé par la qualité du matériau (facile à travailler, il est également très résistant) qu´à sa proximité. Par ailleurs, dès que l´on s´éloigne un peu du centre-bourg, ce n´est plus le grès rouge qui est dominant mais le grès beige et le calcaire (c´est le cas par exemple dans le faubourg du Faure).

La disponibilité de ces différents matériaux sur le territoire de la commune a permis aux commanditaires et aux constructeurs de panacher les grès et le calcaire, notamment au niveau des clefs des linteaux des baies, afin de créer un effet de polychromie très usité tant dans le bourg que dans les écarts (cf. fig. 4) et de répondre ainsi aux exigences esthétiques des commanditaires. Il est également à noter que l´emploi de ces matériaux ne s´est pas limité aux appareils extérieurs, mais a largement été utilisé dans les aménagements intérieurs depuis l´escalier jusqu´à la cheminée (cf. fig. 5 et 26).

L´usage d´un appareil en blocage de moellons pour le gros œuvre et de pierres de taille pour les encadrements des baies et les chaînages d´angle est le cas plus fréquent (cf. fig. 6 et 7). Les moellons étaient le plus souvent destinés à être enduits comme en témoignent les nombreuses traces de badigeon et d´enduit ancien (cf. fig. 8). Et ce n´est qu´à partir du 2ème quart du 20e siècle, lors des premières restaurations de maison, que les maçonneries ont été laissées à nu. D´ailleurs, Collonges-la-Rouge ne devient « la Rouge » qu´en 1969 par la volonté d'un préfet de Corrèze qui voulait éviter tout risque d'homonymie avec d´autres villes du même nom.

Quelques traces résiduelles d´un appareil en pierre de taille subsistent sur les édifices les plus anciens, notamment ceux construits sur les ruines de l´enceinte de l´enclos prieural, le long de la rue de la Barrière. (cf. fig. 9). Le bois est également présent, sous la forme de pans de bois à grille et en croix de saint André (cf. fig. 10 et 11). Ces pans de bois se retrouvent, parfois en encorbellement, au-dessus de rez-de-chaussée en pierre ou dans les cloisons intérieures (cf. fig. 12).

Les caves, généralement voûtées en berceau, sont quasi exclusivement bâties en moellon équarri. (cf. fig. 13).

1.2. COUVERTURES

L´ardoise est aujourd'hui le matériau de couverture prédominant. Cependant, la présence d´autres matériaux, comme la tuile plate, la lauze de grès chevillées ou en tas-de-charge ou encore la tuile industrielle, indique que cela n´a pas toujours été le cas (cf. fig. 14 et 15). Cependant, nous n´avons aucune certitude sur le matériau de couverture d´origine des maisons et des manoirs puisque beaucoup ont été refaites. Néanmoins, il est probable qu´à l´origine l´ardoise et la lauze de grès, notamment pour les couvertures des tours d´escalier étaient largement utilisées (cf. fig. 16). L´utilisation de l´ardoise était facilitée par la présence des carrières voisines de Travassac et d´Allassac. Au 19e siècle, l´ardoise a peu à peu été remplacée par la tuile plate puis par la tuile mécanique sans que la lauze de grès ne disparaisse totalement. Depuis le milieu du 20e siècle, la tuile mécanique n´est plus autorisée lors des réfections de couverture afin de favoriser la réintroduction progressive de l´ardoise qu´elle provienne des ardoisières de Corrèze ou des régions voisines. L´ardoisière de Travassac, en déclin depuis la seconde guerre mondiale, renoue avec le développement à partir de 1989. Quant à l´ardoisière d´Allassac, après un arrêt d´activité en 1976, elle est rouverte en 2002. L´utilisation des ardoises taillées en forme d´écaille ou bien en forme géométrique (cf. fig. 17) est largement répandue dans les maisons et manoirs où les commanditaires n´ont pas hésité à user de ses qualités techniques et esthétiques.

2. STRUCTURES

2.1 PLAN

La majorité des maisons et manoirs présente un plan rectangulaire régulier qui a parfois, au cours des siècles, évolué vers un plan en L. En effet, lorsque, au 18 siècle, les logis sont augmentés ou recomposés, il n´est pas rare que le choix se soit porté sur l´adjonction d´une aile en retour d´équerre (cf. fig. 18). Seules les maisons les plus anciennes, implantées dans le centre-bourg, sur des parcelles en lanière, n´ont pas connu cette évolution.

Cette mutation du plan général du bâti ne s´est pas limitée aux frontières de la commune puisqu´elle a été également constatée sur la commune voisine de Ligneyrac et il est probable que cette pratique était répandue sur l´ensemble du territoire de la basse Corrèze.

2.2. COMPOSITION ET TRAITEMENT DES FAÇADES.

Les maisons présentant des façades à travées sont peu nombreuses (14% des maisons et 28% des manoirs). Elles résultent d´ailleurs, le plus souvent, des remaniements réalisés au 18e siècle (cf. fig. 19). C´est également à cette époque qu´au moins deux maisons en rez-de-chaussée surélevé, situées dans le bourg de Collonges-la-Rouge, ont été transformées en maisons à étage : l´escalier de distribution extérieur devenant suite à la recomposition de la façade un escalier de distribution intérieur (cf. fig. 20). Cette transformation est également perceptible dans certains logis de ferme (cf. Dossier collectif, "Les fermes et les Domaines" n°IA19000364).

Les ornements de façades se traduisent par une riche modénature des baies et des portes avec une large utilisation des appuis saillants moulurés, des linteaux en accolade ou en double accolade et de différents types de moulures (chanfrein ; cavet, moulures creuses...) (cf. fig. 21). Les maisons les plus anciennes du bourg portent également, sur leur façade principale, les vestiges d´un cordon régnant mouluré (cf. fig. 22).

Réservées aux manoirs (Vassignac et Maussac), des portes néogothiques présentant de riches moulures à bases prismatiques sont conservées (cf. fig. 23).

3. TYPOLOGIES

L´architecture des maisons et des manoirs est fortement marquée par les 16e et 17e siècles. Cependant, on ne peut les réduire à cette seule époque et risquer d´occulter leur origine médiévale même si les vestiges antérieurs au 15e siècle se résument, aujourd'hui, à des éléments lacunaires : des portes en arc brisés ou des fragments de décors remployés (cf. fig. 24).

Cinq grands types de maisons et manoirs ont pu être identifiés lors de l´enquête.

1. Les maisons à étages avec (ou sans) tour d´escalier en vis ou tournant dans-œuvre, demi-hors-œuvre ou hors-œuvre représentent 42% du corpus (cf. fig. 25 et 26). Principalement implantées dans le bourg et plus particulièrement le long de la rue de la Barrière, au contact de l´ancien enclos prieural, on les retrouve également dans le barri de la Veyrie. (cf. fig. 27).

2. Les Manoirs (7,5% du corpus) avec leurs tours d´escalier et leurs échauguettes, se caractérisent par la présence de dépendances agricoles et de jardins (cf. fig. 28). Ils se distinguent des maisons par la présence d´une ornementation architecturale plus riche (cf. fig. 29). On les retrouve à proximité immédiate de l´enceinte prieurale de Collonges-la-Rouge, mais également plus à l´écart, dans les barris et dans l´espace rural où ils structurent le territoire (Beauregard, La Fouillade), (cf. fig. 30).

3. Peu nombreuses (2,5% du corpus), les maisons de plan allongé sont essentiellement situées dans le bourg, de façon discontinue, à proximité du cœur historique. Elles comportent rarement plus d´un étage. Libres de toute mitoyenneté, elles se développent sans contraintes et peuvent atteindre jusqu´à 20 m de front. Certaines sont le résultat d´adjonction de corps de bâtiment au fil des siècles (cf. fig. 31).

4. Les maisons en rez-de-chaussée surélevé (32% du corpus) se distinguent par la présence d´un escalier extérieur, parfois couvert d´un avant-toit. Ces maisons ne sont pas toujours faciles à appréhender notamment lorsque les recompositions des façades ont modifié le positionnement de l´escalier extérieur. Certaines sont dites, maisons de « vigneron » du fait de leur organisation sur cave voûtée en berceau, avec un sous-sol ou un cellier, qui répond aux nécessités de l´activité vinicole. Deux sont encore présentes dans le bourg de Collonges-la-Rouge, mais les exemples les plus significatifs, pouvant dater des 16e-17e siècles, sont situés dans les hameaux (Le Faure, Valège) (cf. fig. 32).

5. Les maisons en rez-de-chaussée comptent pour 11% du corpus. De plan rectangulaire, elles sont construites d´un seul tenant et offrent un unique niveau d´habitation. Les plus anciennes, pouvant remonter au 17e siècle, sont construites à l´écart du bourg dans le barri de la Veyrie. Les plus récentes datant de la seconde moitié du 19e siècle et du début du 20e siècle correspondent à des reconstructions sur des bases plus anciennes (cf. fig. 33).

43,5% de ces maisons et manoirs, exception faite des maisons en rez-de-chaussée, sont construits sur un ou deux niveaux de caves, le plus souvent voûtées en berceau (cf. fig. 34).

CONCLUSION

La visite quasi-systématique (près de 90% des maisons et manoirs) a permis de répertorier, outre des cheminées maçonnées présentant un riche répertoire décoratif (cf. fig. 35), d´autres équipements domestiques tels que les bassières et les potagers :

- La bassière est une petite pièce voûtée qui servait d´espace où l´on nettoyait les ustensiles de cuisine et où l´on entreposait des aliments. L´apparition de la bassière est assez tardive (sans doute pas avant le milieu du 18e siècle ?) (cf. fig. 36).

- Le potager permettait de tenir au chaud les aliments. C´est un ouvrage clos et maçonné en pierre. Il est constitué d´une tablette à deux, trois, voire quatre foyers et d´une partie inférieure qui servaient à contenir les braises (cf. fig. 37).

Il est très difficile de dater ces aménagements qui ont été plus ou moins utilisés depuis le 13e siècle jusqu´au début du 20e siècle.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : grès

    Mise en oeuvre : moellon

  2. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : moellon

  3. Matériau du gros oeuvre : brique

  4. Matériau du gros oeuvre : grès

    Revêtement : enduit

  5. Matériau du gros oeuvre : grès

    Revêtement : crépi

  6. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : pierre de taille

  7. Matériau du gros oeuvre : bois

    Mise en oeuvre : pan de bois

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