Historique
Selon l´abbé Courteau et Maurice Dayras (1922), cette maison aurait été construite durant le premier quart du 16e siècle, probablement pour un membre de la famille des Vallenet.
Selon Cyprien Pérathon (1901-1902), cette famille, originaire de la paroisse de Saint-Martin, proche de la ville d´Etampes, se serait fixée à Aubusson dès le 14e siècle, puisque dès 1341, un certain Joseph Vallenet aurait passé testament auprès de deux notaires royaux de la ville. Par la suite, les membres de cette prestigieuse lignée se seraient consacrés, selon les mentions figurant dans plusieurs actes notariés, aux plus hautes charges militaires ou ecclésiastiques et auraient activement participé à la vie de la cité, en occupant les fonctions de consuls ou de jurés-gardes d´Aubusson.
En 1521, un Michel Vallenet est, en effet, qualifié de consul d´Aubusson. Il participe à la rédaction des coutumes de la Marche. En 1572, Jean Vallenet, seigneur de Saint-Avit-de-Tardes, occupe la fonction de capitaine du château d´Aubusson. L´un de ses descendants, également nommé Jean, écuyer et sieur de La Ribière, acquiert en 1612 l´hôtel des Monneyroux, à Guéret. En 1614, il siège comme député du Tiers-Etat de la Sénéchaussée de la Haute - Marche aux Etats-Généraux réunis à Paris sous la régence de Marie de Médicis. Plus tard, Louis Vallenet, sieur de Puyroche, lieutenant d´infanterie dans le régiment du comte de La Feuillade, s´illustre dans la défense de la République de Venise contre les Turcs. Pour le remercier de ses hauts faits d´arme, la Sérénissime souhaite lui conférer la dignité de chevalier. C´est à cette occasion, en 1647, qu´une enquête est commanditée par l´Election de Guéret pour établir la généalogie et la noblesse de la famille Vallenet. Plusieurs témoins attestent alors « qu´ils ont vu et connu la maison des Vallenet vivre noblement, tenant train de chasse, tant à l´oiseau qu´au chien courant, et fréquentant les guerres de père en fils pour le service du roi ». Le frère de Louis, Austrille Vallenet, prieur d´Aubusson dès 1639, produit alors des cachets et des pièces de tapisserie, où ses prédécesseurs ont fait représenter les armoiries de la famille, qui figurent « dans un écusson d´or, enchâssées dans un gosier de poisson marin, en façon de bagues en ovale, œuvrées à l´entour, marquetées de petits grains d´or ».
Jusqu´en 1690, la maison demeure la propriété des Vallenet. Mais à cette date, Louise Vallenet, unique descendante de la famille, est contrainte, en remboursement d´une importante créance, de la céder à François Laboreys de La Pigue, conseiller du roi et président châtelain d´Aubusson. Selon un acte passé devant Finet, notaire royal à Aubusson, « les deux corps de logis attenant ensemble, appelés la maison de chez Vallenet, situés en la place publique de la ville d´Aubusson » sont laissés à la jouissance de François Laboreys.
Ce dernier décède en 1708. Le 28 juin 1729, son fils, Gabriel Laboreys de La Pigue, président châtelain, subdélégué de l´intendant de la généralité de Moulins et inspecteur des manufactures royales de tapisseries d´Aubusson et de Felletin, vend la maison à Pierre Blanchard, marchand de tapisseries. Son fils, Etienne Blanchard, bourgeois, garde-magasin des poudres, la vend à son tour, le 6 juillet 1764, à Michel Jancour, marchand de tapisseries, pour le prix de 6295 livres.
Jusqu´à la seconde moitié du 18e siècle, la maison semble avoir peu changé d´aspect. D´après la vue cavalière d´Aubusson réalisée avant 1685, elle n´était, à l´origine, environnée d´aucune autre construction - si ce n´est l´ancienne halle aux grains (voir notice IA23000519), dont elle n´était séparée que par un étroit passage. En 1788, cette dernière s´effondra lors d´un malheureux incident et fut reconstruite plus au nord, sur l´emplacement de l´actuel monument aux morts. C´est à cette occasion que la fontaine portant les armes de la ville d´Aubusson (voir notice IA23000467) fut déplacée et transportée à son emplacement actuel, à l´angle nord-ouest de la maison.
C´est vraisemblablement durant ce dernier quart du 18e siècle que la façade nord de la maison, donnant sur la Grande Rue, fut entièrement reprise (agrandissement des baies, couvertes de linteaux en arcs segmentaires typiques de cette période, construction d´un balcon filant fermé par un garde-corps en ferronnerie). Ces transformations intervinrent par suite de l´importance prise par la Grande Rue dans la vie commerçante d´Aubusson, puisque c´est entre 1769 et 1772 que le ruisseau de la Ville (qui y coulait encore à ciel ouvert) fut couvert d´une voûte maçonnée, permettant à cette voie de devenir la principale artère de la cité.
Le remaniement de la façade nord s´accompagna d´une profonde restructuration intérieure (présence, aux premier et second niveaux, de lambris de revêtement de style Louis XV et Louis XVI et de cheminées en pierre surmontées de glaces et de trumeaux en bois doré).
En 1812, la maison, selon la matrice du cadastre napoléonien, appartenait à Gabriel Jancour, bourgeois de la ville d´Aubusson. Qualifiée de « presque neuve », elle venait en effet de connaître d´importants travaux de rénovation.
En 1830, la maison, toujours propriété de la famille Jancour, échappe, sans doute en raison de sa qualité architecturale, aux alignements prévus par le géomètre Callier sur la rue Pardoux-Duprat, qui auraient pu conduire à la disparition de la tour d´escalier, qui avait été initialement planifiée.
En 1841, M. Guillot, mercier à Aubusson, acquiert la maison auprès des héritiers Jancour. C´est durant cette seconde moitié du 19e siècle que l´édifice subit de nouveaux remaniements : aménagement, au rez-de-chaussée, d´une boutique ouvrant sur la Grande Rue et d´une porte latérale ; agrandissement des fenêtres sur la rue Pardoux-Duprat ; percement de lucarnes dans l´étage de comble (en particulier la double lucarne située à l´ouest, qui était peut-être destinée à éclairer un atelier de tapissier).
En 1882, la maison appartient à M. Pierre Delarebeyrette.
La famille Malpeyre en est propriétaire depuis le début du 20e siècle.
Une partie de la toiture (côté nord) a été refaite en ardoise après 1905, d´après le témoignage livré par les cartes postales du début du 20e siècle.
Détail de l'historique
Périodes |
Principale : 1er quart 16e siècle Secondaire : 4e quart 18e siècle (incertitude) Secondaire : 2e moitié 19e siècle Secondaire : 2e moitié 20e siècle |
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Description
Cette maison occupe une parcelle d´angle entièrement bâtie, limitée, au nord, par la Grande Rue et à l´ouest et au sud, par la rue Pardoux-Duprat.
Elle se développe sur deux étages carrés et un étage de comble, sous un toit à croupes couvert de tuiles plates et d´ardoises (du côté nord).
Elle s´organise en deux corps de logis (nord et sud) (le premier, simple en profondeur et le second, double en profondeur), réunis par une tour d´escalier en demi-hors-œuvre de plan octogonal.
Le corps de logis nord, en alignement de la Grande Rue, présente une façade en pierres de taille de moyen appareil, à deux travées régulières, couronnées par une corniche moulurée. Le rez-de-chaussée est percé d´une devanture de boutique à arc en anse de panier et d´une porte latérale cintrée, toutes deux de facture récente. Au premier étage, les portes-fenêtres, surmontées de linteaux en arcs segmentaires, sont devancées d´un balcon filant établi sur des consoles et fermé par un garde-corps en fer forgé. Au second niveau s´ouvrent des fenêtres de modénature similaire, avec appuis saillants moulurés. Deux lucarnes à fronton-pignon et devanture de bois éclairent l´étage de comble. Cette élévation est rythmée par un bandeau en léger méplat courant entre le premier et le second niveau.
Sur la rue Pardoux-Duprat, l´angle rentrant entre le corps de logis nord et la tour d´escalier est agrémenté d´une tourelle en surplomb, percée d´un étroit fenestron, qui abrite une petite pièce (cabinet).
La tour qui unit les deux corps de logis, formée de cinq pans coupés, se distingue par sa toiture en poivrière couverte de bardeaux de châtaignier, son pignon en pierre et les quatre baies alignées verticalement qui éclairent l´escalier en vis maçonné qu´elle abrite (et dont la dernière volée est en bois). La porte de cette tour d´escalier, qui constitue l´accès principal de la maison, présente une mouluration spécifique à l´architecture civile du 16e siècle à Aubusson et à Felletin (croisement central du tore en forme d´un V sous l´accolade).
Le corps de logis sud, développe une longue façade à l´ouest, sur la rue Pardoux-Duprat, avec un oriel sur-le-pan à deux étages (abritant une petite chambre prise dans l´épaisseur du mur) et à l´angle sud-ouest, une tourelle en surplomb, assise sur un cul-de-lampe mouluré et coiffée d´un dôme couvert de bardeaux de châtaignier taillés en pointe à l´égout. Cette tourelle contient, à chaque niveau, des placards de rangement. Eclairée par d´étroites baies non alignées verticalement, elle est ornée, à chaque niveau, d´un cordon, qui devait, à l´origine, faire retour sur l´élévation sud et servir d´appui aux belles croisées de style Renaissance encore visibles sur cette dernière.
L´élévation sud, plus étroite, est en effet percée, au rez-de-chaussée, d´une baie de boutique à arc en anse de panier (qui éclaire aujourd´hui une cuisine, avec un potager et une cheminée à linteau monolithe en pierre) et d´une porte piétonne pleine, à clous et à pentures. Aux étages s´ouvrent deux fenêtres à moulurations entrecroisées et bases prismatiques, qui ont manifestement été agrandies par abaissement de l´appui. L´étage de comble est percé d´une lucarne à deux pans, avec jouées bardées d´essentes. A l´extrémité est de cette façade se situe une petite niche, qui était peut-être destinée à abriter une statue.
La structure intérieure des deux corps de logis a été largement modifiée par des aménagements postérieurs, mais aux premier et second étages du corps de logis nord, donnant sur la Grande Rue, ont été conservés des lambris de revêtement de style Louis XV et Louis XVI, ainsi que des cheminées en pierre surmontées de glaces et de trumeaux en bois doré, avec des plaques de foyer remarquables.
A l´ouest, sur la rue Pardoux-Duprat, l´étage de comble, qui a peut-être hébergé des ateliers de tapissiers au cours du 19e siècle, est éclairé par une double lucarne à devanture en charpente et jouées en brique.
Détail de la description
Murs |
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Toits |
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Étages |
2 étages carrés, étage de comble |
Élévations extérieures |
élévation à travées |
Couvertures |
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Escaliers |
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État de conservation |
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Décors/Technique |
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Décors/Représentation |
Précision sur la représentation : Lambris de revêtement de style Louis XV et Louis XVI aux premier et second niveaux du corps de logis nord. Beau garde-corps en fer forgé à motifs géométriques (entrelacs) et végétaux fermant le balcon qui devance le premier étage du corps de logis nord. |
Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier d'oeuvre architecture |
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Référence du dossier |
IA23000470 |
Dossier réalisé par |
Philippe Emmanuelle
Chercheur Inventaire, SRI Limousin de 2009-2012 |
Cadre d'étude |
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Aire d'étude |
Aubusson |
Phase |
étudié |
Date d'enquête |
2008 |
Copyrights |
(c) Région Limousin, service de l'Inventaire et du Patrimoine culturel, (c) Ville d'Aubusson |
Citer ce contenu |
Maison des Vallenet, Dossier réalisé par Philippe Emmanuelle, (c) Région Limousin, service de l'Inventaire et du Patrimoine culturel, (c) Ville d'Aubusson, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/5730a450-78dc-44a3-b064-fc036d983ad8 |
Titre courant |
Maison des Vallenet |
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Dénomination |
maison |
Appellation |
maison des Vallenet |
Statut |
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Protection |
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Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Creuse , Aubusson , 4 Grande-Rue
Milieu d'implantation: en ville
Cadastre: 1812 C 397, 2007 AN 253