Gué et bac (passage d'eau) du Breuil

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Outre le bac situé sur la Creuse à proximité du bourg de La Roche-Posay, un second passage existait sur la commune au hameau du Breuil, sur la Gartempe. Bien qu'il ne figure ni sur le cadastre de 1833, ni sur la carte de l'état-major des années 1840, il est probable qu'il devait se trouver au bout du chemin qui prolonge l'avenue de La Creuse et qui rejoint la rivière de la Gartempe, à proximité de la confluence avec la Creuse. En outre, sur la carte de l'état-major des années 1840, un autre passage est signalé plus au nord, au hameau de Posay, mais son existence n'est réellement attestée que dans une demande de 1891 (cf infra).

En 1837, une " compagnie privée " se serait formée pour exploiter le passage lorsque le niveau des eaux ne permet pas la traversée à gué. En fait, il s'agit de l'initiative de propriétaires de Confluent/Conflans, Napre et la Mothe, sur la presqu'île formée à la confluence de la Creuse et de la Gartempe (commune d'Yzeure-sur-Creuse, Indre), se sont regroupés et ont créé un bac à leurs frais pour faciliter leur communication avec La Roche-Posay et cherchent à couvrir une partie de leur dépenses par l'établissement d'un péage.

La commune demande le 8 septembre 1839 à l'Etat s'il ne serait pas plus avantageux d'établir un passage public en rachetant le bateau déjà construit (indemnité de 850 francs) et en fixant un tarif de passage identique au péage du pont sur la Creuse. Pour le directeur des contributions indirectes, le bateau devrait être à la charge du fermier et non de l'Etat. L'ingénieur en chef Mounier estime si le produit du passage est insuffisant pour couvrir les frais, la commune devrait être fermière de ce bac, à ses frais, contrairement à ce qui a été fait à Nalliers, et que le pont sur la Creuse permet déjà un passage aisé entre La Roche-Posay et Yzeure-sur-Creuse.

Le 8 mai 1856, le conseil municipal demande l'établissement d'un passage public. Le passage était alors assuré, illégalement selon l'Etat, par M. Royer, membre du conseil municipal, et soupçonné par les Ponts-et-Chaussées d'agir pour la commune. L'administration finit par accepter le principe d'un bac public. La commune demande à récupérer le droit de passage et établit une évaluation des coûts que cela induirait (amélioration des rampes d'accès 1800 francs, construction d'une maison pour le passeur 3000 francs). Le bac est guidé par un câble (traille). Les ponts-et-chaussées veulent que le bateau soit à la charge du fermier.

En janvier 1858, l'ingénieur Hart procède à un relevé en coupe et à un repérage des différents niveaux d'eau de la Gartempe (voir illustration et annexe). Par arrêté préfectoral du 7 avril 1858, le directeur des contributions indirectes est autorisé à prendre possession du bac (passage, bateau et autre matériel utilisé).

Cependant, lors de l'adjudication générale des bacs à compter de janvier 1859, le bac du Breuil n'a pas trouvé preneur contre une redevance de 60 francs par an. La commune, qui a acquis un bateau pour 525 francs, souhaite postuler mais en n'assurant le service que le vendredi, jour de marché à La Roche-Posay, et le dimanche, et les jours de foire à Pleumartin et La Roche-Posay, conditions refusées par l’État (Ponts-et-Chaussées comme Contributions indirectes). L'ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées soupçonne la commune d'organiser néanmoins le passage, au détriment du trésor public et du fermier du bac de Barbousseau et expose qu'il faut soit interdire le passage, soit l'organiser non plus par adjudication, mais par paiement d'une prime qui couvrirait les frais d'entretien, de salaire, etc., car le service ne rapporterait que 60 francs par an à M. Royer alors qu'il en faudrait 700 pour couvrir les frais d'exploitation.

En janvier 1860, le ministère des Finances approuve la mise en fermage du bac au profit de la commune de La Roche-Posay, représentée par son maire, Louis Joseph de Talibon, pour 9 ans à compter du 1er janvier 1859, moyennant un fermage annuel de 5 francs. Le matériel, appartenant au fermier et estimé à 530 francs, se compose :

- d'un bac de 11m95 de longueur, 3m80 de largeur au milieu et 2m85 de largeur sur les levées, " construit en 1844 et encore assez solide " (valeur 440 francs), garni de ferrures et de chaînes. Manœuvrable par deux mariniers, il peut transporter 60 personnes, y compris les mariniers, ou 5 chevaux, mulets, bœufs ou vaches ;

- d'un batelet ou toue de 7m45 de longueur, 1m50 de largeur et 0m50 de largeur aux extrémités (valeur 60 francs) ; manœuvrable par un seul marinier, il peut transporter 6 personnes y compris le passeur ;

- d'un ponton de 2m80 de longueur pour 1m10 de largeur, composé d'un bâti en chêne recouvert d'un plancher en bois blanc ; " Le deuxième ponton a été entraîné par une crue et devra être remplacé " ;

- de trois bâtons ferrés ou bourdes, d'une écope et d'un cadenas.

Le batelet est en assez bon état et appartient au sous-fermier qui l'utilise aussi à la pêche, le reste du matériel appartient à la commune. Le tarif fixé pour la traversée est le même que pour le pont suspendu. En 1860, le sous-fermier est Jules Emrick, qui ne sait pas signer. Le bornage de délimitation du port est réalisé le 8 novembre 1860 par des piquets en bois implantés au sommet de la berge à 500m de part et d'autre du passage sur la rive gauche.

L'arrêté préfectoral du 30 août 1861, qui fait suite à la visite du 12 avril 1861, exige la réparation immédiate du bac, du batelet et du ponton, le goudronnage des bateaux et l'établissement de sièges.

Les visites du 26 avril 1862, du 13 novembre 1862 et du 9 mai 1863 notent que le matériel est en bon état, le bac et le batelet sont équipés de planches servant de sièges ; la cale d'abordage de la rive gauche est en bon état, " celle de la rive droite est à travers prés et peu facile ". Le sous-fermier présente son certificat de moralité mais pas son certificat d'aptitude.

L'arrêté préfectoral du 7 décembre 1863 exige de fournir le certificat d'aptitude du marinier.

La visite du 29 avril 1864 ne note rien de particulier, le matériel est en bon état.

Lors de la visite d'octobre 1864, le matériel est en bon état mais le sous-fermier Marnay n'a pas pu présenter ses certificats d'aptitude à la fonction de marinier, qu'il dit avoir égarés. Le bac est préparé pour recevoir quelques réparations sans le retirer de l'eau (remplacement de quatre courbes et d'une courbe de levée, et de quelques madriers formant le plancher supérieur).

En juin 1865, le contrôleur de travaux trouve le bac, le batelet et leur matériel en bon état, ce qui ne sera plus le cas six mois plus tard par le nouveau conducteur de travaux. Il faudrait néanmoins remplacer quelques madriers du bac et goudronner les deux bateaux à la belle saison. Un seul marinier, le sous-fermier Marnay, assure les traversées.

Par arrêté préfectoral du 1er décembre 1865, suite à la visite du 14 novembre précédent, la commune, fermière du bac, est mise en demeure de réparer le grand bateau, de fournir un ponton d'abordage sur chaque rive et et d'adjoindre au service du bac un deuxième marinier qualifié dès réception de l'arrêté.

Le 25 mai 1866, le conducteur de travaux note dans sa visite semestrielle que le grand bac a besoin d'être réparé, trois courbes sont à remplacer et les joints doivent être refaits. Le batelet est neuf (mais non décrit), avec des accessoires en bon état. Les cales d'abordage sont en assez bon état. M. Marnay, sous-fermier, assure seul la fonction de marinier. Bien que ne sachant ni écrire ni signer, il possède les certificats nécessaires à l'exercice de ses fonctions.

Par arrêté préfectoral du 9 novembre 1866, la commune, fermière du bac, est mise en demeure de réparer au plus vite le grand bateau et d'adjoindre au service du bac un deuxième marinier qualifié.

La visite du 15 novembre 1866, en présence de M. Marnay, sous-fermier, note qu'il manque le poteau indiquant les hauteurs d'eau au-dessus et en deçà desquelles le passage ne peut plus être assuré ainsi que le niveau à partir duquel la surtaxe est exigible, poteau semblable à celui installé sur la rive gauche. Malgré quelques réparations insuffisantes, le grand bac, qui appartient à la commune et mesure 11m95 de longueur, 3m80 de largeur au milieu et 2m80 de largeur sur les levées, est toujours en très mauvais état. Le batelet n'est pas décrit. Les deux embarcations ont besoin d'être goudronnées. En principe, le service devrait être assuré par deux mariniers, mais seul le sous-fermier est affecté à la traversée ; il se fait aider quand il en a besoin par des personnes agréées, notamment son fils Alexandre.

Par arrêté préfectoral du 14 décembre 1866, la commune, fermière du bac, est mise en demeure de réparer au plus vite le grand bac, notamment les courbes, le plancher du fond et le calfatage.

Le conducteur de travaux Leclert note dans sa visite annuelle en avril 1867, en présence du sous-fermier, M. Marnay père, que le grand bac vient d'être réparé, mais que la barque n'a pas été goudronnée. Un seul marinier, le sous-fermier, est affecté au service du bac, parfois aidé par son fils Alexandre Mornay. Les chemins d'accès sont en mauvais état mais c'est à la commune de La Roche-Posay, fermière du bac, de procéder aux réparations.

Par arrêté du 16 décembre 1867, le préfet impose au (nouveau) fermier, Louis Moreau (qui ne sait pas écrire), la mise en bon état d'entretien des cales d'abordage, le remplacement de deux courbes au grand bac et le calfatage de ses joints ; le 30 mai 1868, il exige le remplacement de quatre courbes et de plusieurs madriers du grand bac, de calfater ses joints et de goudronner le bac et le batelet. En mai 1868, le conducteur de travaux note que le batelet est neuf. Quand il en a besoin, le fermier se fait aidé par Alexandre Marnay, fils de l'ancien sous-fermier.

Par arrêtés du 8 décembre 1868 et du 7 juin 1869, le préfet impose au fermier, Louis Moreau, le remplacement du ponton manquant sur la rive gauche.

L'arrêté préfectoral du 22 septembre 1871 exige la pose immédiate du piquet devant indiquer les niveaux d'eau (maximum, surtaxe et minimum) sur la rive droite. Ces avertissements sont sans effets et répétés régulièrement. L'arrêté du 26 mai 1873 demande en outre le remplacement de planches du grand bac (déjà demandé par arrêté préfectoral du 10 décembre 1872) et du batelet et de remplacer le ponton sur la rive droite. L'arrêté du 12 décembre 1875 rappelle l'obligation d'afficher le tarif sur les deux rives et demande une mise en conformité sous un mois.

En 1875, le matériel appartient au fermier du bac et le chemin d'accès est signalé comme étant en mauvais état. En 1874, le bac a été échoué puis coulé sur la rive droite : le fermier précise que le passage avec le bac est impossible pendant 10 mois de l'année soit du fait du niveau d'eau trop faible, soit de l'état des chemins d'accès. Il a démonté les pontons. Il assure le passage avec le seul batelet. En novembre 1876, l'ingénieur recommande qu'il soit remis à flot le plus vite possible. L'ingénieur s'interroge sur l'opportunité de maintenir ce passage, qui n'a plus guère d'utilité avec la possibilité de passer par les ponts sur la Creuse à La Roche-Posay et Yzeures.

En 1876, le sous-fermier est toujours Moreau.

Le bac n'a pas pu être affermé en 1885.

Les 24 et 25 août 1886, les ingénieurs des Ponts et chaussées constatent que le passage est assuré par M. Mérot, pêcheur, qui assure le passage en toute illégalité, percevant des droits de passage pour un nombre de personnes assez important sans autorisation, puisqu'il n'est pas fermier du bac. Le 10 septembre 1886, un arrêté préfectoral interdit la traversée par M. Mérot, sauf s'il obtient un acte d'abonnement.

Le 20 avril 1891, Alexandre Marnay demande de remettre en service le bac qui permettait aux habitants de la presqu'île situé à la confluence de la Creuse et de la Gartempe de se rendre la la Roche-Posay le dimanche (jour de marché) et les jours de foire. L'ingénieur ordinaire des Ponts-et-Chaussées est d'accord sur le principe, mais pas au profit de M. Marnay, [qui] est un braconnier de pêche qui a subi diverses condamnations à ce sujet et a été révoqué comme compagnon de pêche " (Quarré, 2 juillet 1891, Archives départementales de la Vienne, 3 S 36). Une nouvelle demande est alors formulée par François Bédouin, agriculteur, qui sollicite l'autorisation d'exploiter l'ancien bac du Breuil et l'ancien bac près du village de Posay-le-Vieil, tous deux sur la Gartempe. L'ingénieur des Ponts-et-Chaussées, Quarré, demande de joindre l'autorisation des propriétaires des parcelles privées qui doivent être traversées pour accéder au bac de Posay, qui aurait permis aux " habitants de l'île " (de la presqu'île) de traverser le dimanche. Le 1er décembre 1891, Bédouin reformule sa demande pour le seul bac du Breuil. Il est désigné titulaire du passage (acte d'abonnement) pour 3 ans à partir du 1er janvier 1892 : il percevra les droits de passage suivant le tarif de 1859 sans aucune redevance au profit du trésor, " eu égard au peu d'importance du bac et à son exploitation restreinte ". Le règlement est revu pour remplacer " adjudicataire " par " abonnataire ". Le service n'est assuré que les dimanches et jours de foire à La Roche-Posay par un batelet de 5m32 de longueur, 1m40 de largeur au milieu et 0m52 à chaque extrémité, garni d'une chaîne avec cadenas, deux perches ferrées et une écope (Archives départementales de la Vienne, 3 S 36).

Le 22 mars 1902, les services des domaines réclament au préfet le procès-verbal des droits à percevoir de 1895 à 1903 au passage du Breuil.

Périodes

Principale : 19e siècle (détruit)

C'est le seul bac de la vallée de la Gartempe pour lequel il n'y a pas de document figuré. Les documents d'archive permettent de se faire une idée du matériel (bateaux et accessoires), des pontons et des cales d'abordage (voir en partie historique).

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Vienne , La Roche-Posay

Milieu d'implantation: isolé

Lieu-dit/quartier: le Breuil

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