Présentation de la commune de Thonac

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Les origines

Des tessons du Bronze final II et un fragment de bracelet en schiste à section en demi-jonc du premier âge du Fer retrouvés dans la cavité de la Croze de Salvetou, à 1,3 km au nord du bourg, témoignent d'une occupation au cours de la Protohistoire. En revanche, l'entrée dans l'histoire du territoire reste obscure, faute de fouilles ou de prospections archéologiques : aucun vestige des périodes gallo-romaine ou tardo-antique n'a été mis au jour dans la commune. En l'absence de tels éléments matériels, on ne peut qu'émettre des hypothèses, spécialement quant à l'origine du bourg de Thonac : l'occupation au premier âge du Fer que l'on a évoquée, qui pourrait avoir été pérennisée sur le site, la désinence latine du nom (la finale domaniale celto-latine -acum), l'implantation du village au bord de la Vézère et sa proximité d'un cours d'eau (le Thonac) sont autant d'arguments ou d'indices qui font penser à une implantation dès cette haute époque, à l'instar des communes de Montignac, Peyzac, Tayac ou Tursac qui présentent des caractéristiques semblables.

Le Moyen Âge

Le Haut Moyen Âge n'est guère mieux documenté. Comme pour la période précédente, nous en sommes réduits aux conjectures. La création de la paroisse remonterait à l'époque comprise entre le Ve et le VIIe siècle, soit la première période d'évangélisation dans la vallée de la Vézère, tout particulièrement autour de Montignac, qui se caractérise par des églises fondées sous le vocable du proto-martyr Saint-Pierre-ès-liens, telles les églises de Montignac, Bars et le Cern (La Bachellerie). Un premier édifice aurait été construit à ce moment et, par conséquent, un village se serait développé autour de lui. Mais rien ne subsiste de ce premier pôle ecclésial. En réalité, il faut peut-être attendre le XIIe siècle pour trouver le vestige d'une construction dans la commune : la fenêtre axiale du chœur actuel de l'église paroissiale Saint-Pierre-ès-liens de Thonac pourrait dater de ce siècle.

Les preuves matérielles et textuelles d'une occupation du territoire deviennent plus nombreuses et concrètes pour le XIIIe siècle. Avec sa porte en arc-brisé à longs claveaux, sa maçonnerie en moyen appareil de pierre de taille et son hourd en bois (disparu), la tour de La Bermondie date de ce moment. C'est en effet au cours de ce siècle que le seigneur-châtelain de Montignac concède en fiefs des portions de son territoire à des membres de la chevalerie de son entourage, domicelli ou milites castri, afin de protéger par des points d'appui sûrs son organisation castrale. La Bermondie est le premier cité dans les textes ; mais Peyretaillade (Losse) et Belcayre ont pu être créés au même moment : ce sont les trois plus importantes seigneuries de Thonac. Ces deux dernières, qui occupent des sites éminemment stratégiques, fonctionnaient comme un verrou sur la Vézère à la remontée vers Montignac : ainsi placés à l'intersection de cinq anciennes paroisses, Thonac, Saint-Léon, Sergeac, Valojoulx et Montignac, et en surplomb sur la rivière, les deux sites, certainement fortifiés, protégeaient et contrôlaient - par des péages ? - le trafic fluvial en même temps qu'ils verrouillaient l'accès aux paroisses précitées.

Une ferme au Maillol, qui présente un pan de mur en moyen appareil de pierre de taille et un jour vertical en plein-cintre du XIIIe siècle, et les nombreuses mentions au siècle suivant de mas ou de bordaria (des exploitations agricoles d'une certaine importance) ou encore d'un moulin révèlent que le territoire présentait déjà un maillage dense d'exploitations et de domaines nobles ou roturiers, liés entre eux par des chemins : ce sont le "molendino Johannis Bermon" (le moulin de La Bermondie) en 1304, la "tor dal Bruelh" (la tour du Breuil) et la "Grinha" (Grigne) en 1383, les "Malhols" (Maillol, déjà cité) en 1402. C'est également en 1304 qu'est mentionnée pour la première fois la route menant à Montignac : la "via publica qua itur de dicto molendino versus Montinhiaci". C'est encore au XIIIe siècle que la paroisse est attestée comme faisant partie de l’archiprêtré de Sarlat dans un Pouillé. Lorsque l'archiprêtré est érigé en diocèse de Sarlat en 1317, la paroisse de Thonac est intégrée dans l'archiprêtré d'Audrix, du diocèse de Périgueux. En 1411, les bénéfices de la paroisse dépendent de l'abbaye de Saint-Amand-de-Coly.

Aux XIVe et XVe siècles, la paroisse est souvent citée : "Tonac" en 1324, "Thonacum" en 1382, "Tonnacum" en 1411. Elle fait alors encore partie du vaste territoire de la puissante châtellenie de Montignac, qui comprenait quatorze paroisses, et s'inscrit pleinement dans sa sphère d'influence domaniale. Pour preuve, la forte densité de châteaux et maisons nobles repérés (tous relevant par hommage du seigneur-châtelain), qui doit être soulignée : peu de communes comptent un tel groupement de domaines nobles. Hors les trois plus importantes seigneuries déjà citées, Peyretaillade (Losse), La Bermondie et Belcayre, on peut énumérer La Vergne, La Chapoulie, Le Breuil, Le Buisson, Labatusserie, Logénie et La Vidalie, sans compter "Le Chaptal" (cité comme repaire noble à Thonac par Gourgues, p. 69, mais que nous n'avons pas pu identifier). Ce propos doit cependant être nuancé : l'origine médiévale de plusieurs de ces domaines n'étant pas avérée, quelques-uns sont peut-être des créations modernes ; et certains d'entre eux, certes appelés "repaire noble" ou "domaine noble" dans les textes, appartenaient ou dépendaient directement, soit du seigneur de Peyretaillade (La Vidalie, Le Buisson), soit de celui de La Bermondie (La Vergne), mais n'étaient peut-être pas tenus en propre par un petit seigneur.

Un autre site, qui n'est pas mentionné par les textes, présente pourtant des vestiges intéressants du XIVe siècle : la ferme de La Ribeyroullie. En tout, ce sont pas moins de 18 sites de la commune de Thonac dont l'origine peut remonter à l'époque médiévale.

Comme d’autres paroisses de la vallée de la Vézère, peut-être en raison de sa proximité avec la ville plusieurs fois assiégée de Montignac, Thonac a subi d'importants dommages lors de la guerre de Cent Ans. Ceux-ci ont laissé des traces : les nombreuses pierres rubéfiées remployées dans les maçonneries modernes, qui sont les stigmates de violents incendies. Au bout du compte, seuls l’église de Thonac et les sites de Maillol, La Ribeyroullie, Le Breuil et La Bermondie recèlent des éléments en élévation antérieurs au XVe siècle.

Les Temps modernes

Après la fin des hostilités, l’image générale de Montignac et des paroisses alentours est celle d’un pays ravagé qui peine encore à se relever. Dans la vallée de la Vézère, la reprise ne survient, en effet, qu’avec un important décalage chronologique à partir des années 1490. Ce constat se vérifie également pour Thonac : si l'église est certainement le premier édifice de la paroisse a être relevé, les châteaux voisins de Peyretaillade (Losse), Belcayre et La Bermondie ne l'ont été qu'au tournant du XVIe siècle avec, au même moment ou à leur suite, quelques maisons du bourg et repaires nobles (Logénie), métairies (La Ribeyroullie) ou fermes (Pialadias) dans la campagne environnante. C'est précisément à cette époque, en 1502, qu'un mémoire établi pour le seigneur d’Albret contre la dame de Montrésor, qui décrit le comté du Périgord, indique qu’à "Tonnac, [il] y a de gentishommes, monseigneur de Peyretaillade [Losse], Belcayre, Cazerac [Jean de Casnac ou Cazenac, Cazerac, originaire de Beynac], Jehan Bermon, Antoyne Berm[on] et Ramonet Berm[on] ; chacun a sa metayrie franche et beaux domaines, chacun cinquante livres de rente, monseigneur n'y prend rien."

Le XVIe siècle fut pour Thonac une période de mutation importante, dans le sillage de l'ascension sociale d'un enfant du pays, Jean II de Losse (1504-1579/80). Orphelin de père à l'âge de 11 ans, placé comme page de François Ier dès ce moment, il gravit les échelons dans l'armée royale par des faits d'armes, d'abord auprès de l'amiral de France Philippe Chabot, puis du connétable de Montmorency et, enfin, auprès des rois Henri II, François II et surtout Charles IX : il fut successivement gouverneur de Thérouanne, de Mariembourg et de Verdun, nommé gentilhomme de la chambre du roi et fait chevalier de l'ordre de Saint-Michel. A la fin de sa carrière, il cumule les charges de conseiller d'état au conseil privé du roi, gouverneur de Lyon puis d'une partie de la Guyenne, lieutenant-général des armées royales sous le commandement du duc d'Anjou, futur Henri III, et capitaine des gardes écossaises puis du Louvre ; en 1578, il fait partie de la première promotion de l'ordre du Saint-Esprit créé par Henri III. C'est à ce personnage d'envergure nationale que l'on doit la reconstruction, l'agrandissement et l'embellissement du château de Peyretaillade, désormais appelé Losse, en plusieurs phases de travaux intimement liées à son ascension. En effet, Jean II de Losse semble avoir eu à cœur de matérialiser dans la pierre chacune des étapes de sa brillante carrière. Le premier pas est franchi lorsque Jean, après avoir rendu hommage pour la seigneurie de Peyretaillade à son nouveau suzerain Henri II d'Albret le 1er octobre 1541, acquiert de celui-ci et de son épouse Marguerite d'Angoulême le 23 octobre suivant "tout le droit de justice, haute, moyenne et basse [...] es bourg et parroisse de Tonac" pour 1 200 livres. Autrement dit, la paroisse de Thonac, jusqu'ici dans le giron de la châtellenie de Montignac, en est détachée pour devenir une juridiction indépendante, placée entre les mains de Jean de Losse ; cet acte fait ainsi de Peyretaillade, alias Losse, le siège d'une seigneurie haut-justicière, la plus éminente du territoire, éclipsant toutes les autres (Belcayre, La Bermondie, etc.). Toutefois, plusieurs actes passés ensuite, en 1557, en 1570 et en 1572, indiquent que cette acquisition n’alla pas de soi et connut des vicissitudes qui trouvèrent finalement leur résolution en 1572. A partir de ce moment, la famille Losse règne en maître sur la paroisse... ce qui ne l'empêche pas de chercher à étendre son pouvoir aux alentours : dès 1588, Jean III de Losse, le fils de Jean II, acquiert du roi les mêmes droits sur la paroisse de Saint-Léon-sur-Vézère et sur d'autres lieux voisins. En 1609, Jean III rend ainsi hommage au roi "pour raison du château de Losse, de [La] Bermondie, Saint-Lyons [Saint-Léon-sur-Vézère], maisons, moulins, rentes de Montignac, rentes d’Asserac [le moulin de La Bermondie], des maisons de Pervignac [Peyrignac] et de Mellet [à Beauregard-de-Terrasson], mouvant du roi à cause du comté de Perigord et vicomté de Limoges". La seigneurie de Losse, ainsi amplifiée, est érigée en marquisat au XVIIe siècle.

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, Thonac semble connaître une relative prospérité. La carte de Belleyme, levée en 1768 pour cette partie de la vallée de la Vézère, figure de grandes plaines agricoles bordées d'importantes zones viticoles sur les coteaux voisins, autour de Losse, La Ribeyroullie, Belcayre, La Bermondie, Labadie, Poulican et la Girbaudie, ou encore La Pagésie. La carte de Belleyme n'est pas le seul témoin de ce passé viticole : de nombreux textes mentionnent la présence de vignes, tel le bail d'une pièce en vigne à Jean Dumas au Breuil en 1638 (AD Dordogne, J 317), et plusieurs maisons nobles, métairies ou fermes de la commune, certaines remontant au début de la période moderne (réf. IA24004345), conservent des chais ou des cuviers en niveau de soubassement. En outre, la carte de Belleyme témoigne des infrastructures alors en place qui conditionnent l'activité économique de la paroisse : les routes royales récemment réparées ou refaites, de Montignac à Périgueux et Saint-Léon, la Vézère qui constitue toujours l'axe de circulation privilégié des marchandises pendant une partie de l'année, le moulin et l'écluse de Losse, les moulins de Poulican, de Logénie et de Chinchaubran (alias Cazenare), ou encore la forge de Losse.

Toutefois, ce tableau trop idéal cache des disparités de fortune et de richesse que les événements de la Révolution révèlent au grand jour. En 1790, le procureur du roi de la Maréchaussée générale de Guyenne, au département du Périgord, porte plainte contre les habitants de différentes paroisses réunies, notamment de Valojoulx, Sergeac, Saint-Léon et Thonac, qui, assemblés au nombre de plus de 300, se transportent chez les particuliers, de préférence chez les seigneurs et les curés, où ils mettent tout à contribution, jusqu'à enlever les grains qu'ils trouvent, à les forcer à donner leur argent, les menaçant d'incendier leurs châteaux, se permettant même de faire feu sur les personnes. Enfin, le procureur du roi les accuse d'exercer toute sorte de brigandages : ainsi attroupés, ils plantent, au milieu des places publiques et devant les châteaux et maisons des seigneurs, des arbres d'une grande hauteur, dont quelques-uns ont la forme de potence, et en haut desquels ils placent un balai, une mesure de grains, une radoire, un crible et, de plus, un écriteau portant quittance de rentes. Ces particuliers cherchent également à enlever les girouettes placées sur les châteaux ou maisons particulières et, en cas de résistance de la part des propriétaires, ils se livrent contre eux à de graves excès, allant même jusqu'à l'incendie de leurs propriétés (AD Dordogne, B 1688, procès-verbal des 28 et 29 janvier 1790). De fait, plusieurs nobles de la paroisse sont contraints de fuir, délaissant domaines et meubles.

L'époque contemporaine

En 1793, la paroisse devient la commune de Thonac. C'est peut-être à ce moment qu'elle perd une partie de son territoire, au sud : la métairie de Belcayre et l'écart du Bonhomme, encore inclus dans le périmètre de la paroisse de Thonac en 1768 (carte de Belleyme), sont intégrés à la commune de Saint-Léon.

Le cadastre ancien établi en 1813 témoigne encore à son tour, mais de manière plus précise, de l'importance de la viticulture dans cette partie de la Vézère : les coteaux exposés en contrebas de La Bermondie, de Losse, de La Pagésie ou encore de La Ribeyroullie comprenaient alors de grandes parcelles de vignes. La commune compte aussi un site industriel, l'ancienne forge de Losse, qui est rétablie en 1811 par son nouveau propriétaire, le comte Henri Garnier de Laboissière. La première moitié du XIXe siècle est plutôt florissante pour Thonac, qui voit sa population grossir, passant de 502 habitants en 1793 à 613 en 1851, au début du second empire.

Mais, à partir de là, on note une chute constante de la population, liée à l'exode rural, et qui va perdurer jusqu'en 1968 (où la population n'est plus que de 197 habitants). Au cours de cette période en effet, la grave crise du phylloxéra a ravagé les vignobles, y compris ceux des plus beaux domaines, comme ailleurs dans la vallée au cours de la seconde moitié du siècle. La carte d'état major où aucun vignoble n'est représenté en atteste. En 2010, la part des vignes dans la SAU (surface agricole utile) de Thonac était nulle.

Au cours du XXe et du début du XXIe siècle, la tour de La Bermondie est inscrite (1941) et le château de Losse est classé (1932, puis 2007) au titre des Monuments historiques. Depuis 1968, la population de Thonac est en progression constante, passant de 197 habitants à 256 en 2016, 257 en 2020. La commune ne compte plus que deux agriculteurs en 2015. Depuis le 11 décembre 2015, la commune de Thonac fait partie du site classé de la vallée de la Vézère et de sa confluence avec les Beunes.

La commune de Thonac est située au sud-ouest de Montignac. Son territoire, composé du chef-lieu communal et de plus d'une vingtaine de lieux-dits, s'étend sur 1 162 hectares. La commune est bordée au sud-est par la Vézère qui lui sert de limite communale et est traversée du nord au sud par son affluent, le Thonac. Les deux courbes inverses que forment la rivière à Thonac abritent, l'une au sud le château de Belcayre, l'autre au nord le château de Losse. L'altitude maximum est de 231 mètres au sommet de la colline de l'Escourtaudie au nord de la commune et de 70 m au minimum en fond de vallée, près du bourg de Thonac, au sud. Le territoire repose en grande partie sur une base calcaire du jurassique, spécialement à l’ouest de la Vézère dont la vallée est constituée d’alluvions du quaternaire. La route départementale 706 est la principale voie de communication de la commune, également desservie par la route départementale 45.

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