Port de Coulon

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Un port important dès le Moyen Age

Les cartes de la région par Claude Masse au début du 18e siècle, montrent le bourg agglutiné sur la rive droite d'un des bras de la Sèvre Niortaise qui serpentent alors depuis Magné. La carte du 46e carré en particulier mentionne un port au niveau du bourg mais aussi un autre juste en aval, vers l'actuelle prairie de l'Autremont.

Le port de Coulon est, dès le Moyen Age, l'un des principaux situés sur la Sèvre Niortaise, entre Niort et Marans. De nombreuses denrées y transitent, notamment du sel. En 1325, Raoul, comte d'Eu et seigneur de Benet, donne à Guillaume de Verruye la part qu'il possède "au passage ou rivage et au levage" à Coulon. Le 1er juin 1377, Jean, duc de Berry, de passage à Niort, décide par lettres patentes la levée d’un impôt ou "coutume" pour financer la construction d’un nouveau port à Niort. La taxe est imposée sur les marchandises passant non seulement par la cité mais aussi dans les principaux ports alors situés sur la Sèvre Niortaise, dont celui de Coulon. En 1390, un papier censaire de la commanderie de Sainte-Gemme mentionne le port et plusieurs maisons y tenant. Un autre en 1453 évoque "un arbergement assis devant le port".

Perçus par les seigneurs de Coulon, les droits de péage ou de Coutume sont prélevés Jusque dans la seconde moitié du 16e siècle en un lieu appelé plus tard "Vieille Coutume". C'est ce qu'explique un mémoire produit le 24 octobre 1790 par le comte de Montbrun, ancien seigneur de Coulon, au sujet de ces droits. A cette date, la maison est détenue par le nommé Simon ; or, un plan du bourg de Coulon vers 1780, situe la maison de Jacques Simon (repère n° 30) à l'emplacement de l'actuel 14 rue de l'Eglise. A cette époque, le cours historique de la Sèvre Niortaise passait là, avant d'être déporté vers le sud en 1807-1808 (voir plus loin). Le port de la rue de l'Eglise étant peu facile d'accès, le siège de la Coutume est déplacé entre 1570 et 1583 sur la place de la Coutume, lorsque Pierre Pellot, seigneur de Coulon, y achète ce qui devient alors la Maison de la Coutume.

En 1787, un mémoire établi dans le cadre d'un contentieux entre le seigneur de Coulon, le comte de Montbrun, et Pierre Grelet, explique qu'il existe alors dans le bourg de Coulon 21 "arrivages" ou fossés ou "doues" que, depuis des siècles, les riverains ont aménagés de distance en distance. Ces petits canaux "boivent dans la rivière et servent de bassin aux petits bateaux, à la faveur desquels les récoltes, les marchandises, les effets, les denrées et tous les objets de consommation journalière se distribuent dans les bourgs et villages qui bordent la rivière". Le seigneur de Coulon en possède lui-même un qui baigne la partie septentrionale de son logis seigneurial et auquel en aboutissent dix autres. Parmi ces ports et doues, existent le port de la Péchoire, le port aux Moules (qui a donné son nom à la rue qui l'a remplacé), ou encore, mais alors envasé, le port aux Huîtres (sur le côté ouest de la place de la Coutume).

Un nouveau cours pour la Sèvre Niortaise à travers Coulon : les projets Demetz (1798) et Tréton-Dumousseau (1807)

Un plan du bourg de Coulon vers 1780, puis un plan de la traversée de la Sèvre dans le bourg de Coulon, par l'ingénieur en chef Pierre Tréton-Dumousseau en 1807, montrent des rives chaotiques, non canalisées, souvent arborées, et indiquent surtout que la Sèvre telle qu'elle s'écoule aujourd'hui n'existe pas encore en amont de la Trigale et du débouché de la Vieille Sèvre de la Repentie. Un ancien bras du fleuve, venant du nord-est, étroit et sinueux, serpente dans la partie basse actuelle du bourg, au niveau de la rue du Château bas, de la place de la Péchoire, coupant la rue de l'Eglise (au niveau du numéro 14) puis le parc actuel de la mairie, pour rejoindre la Vieille Sèvre de la Repentie juste en amont du port de la Coutume. Au-delà, sur la rive gauche, s'étendent des marais et de rares habitations, ainsi que le bras de la Repentie.

Quelques années avant l'établissement de ce plan, le 19 juin 1798 (1er messidor an 6), l'ingénieur en chef Demetz visite les lieux en même temps que l'ensemble de la Sèvre Niortaise depuis Niort jusqu'à Arçais, avec pour mission de reconnaître les obstacles à la navigation et à l'écoulement de l'eau. Au niveau de Coulon, il remarque que beaucoup de riverains ont empiété sur le cours du fleuve, par des dépôts ou des constructions. Comme à Magné, il existe ainsi sur les rives de la Sèvre des dépôts de fumier ou encore des réservoirs à poissons retenus par des pieux qui ont fini par former de véritables trottoirs devant les habitations. Les propriétaires de Maurepas, quant à eux, ont déposé des gravas dans le lit du fleuve pour pouvoir le traverser et accéder à un pré situé sur l'autre rive. Plus loin, un peu en amont du port de la Coutume, un îlot, propriété de Jean Guillemot, s'est beaucoup agrandi à la confluence entre la Vieille Sèvre de la Repentie et le bras historique de la Sèvre qui s'écoule dans la partie basse du bourg. Il explique que ce dernier formait l'ancien lit de la Sèvre, qu'il est devenu impraticable et qu'on est obligé d'utiliser la Vieille Sèvre de la Repentie, cours d'eau pourtant très sinueux, plein de hauts fonds et très incommode à naviguer. Il estime urgent de rétablir la navigation dans le bras historique de la Sèvre, à l'origine "beaucoup plus commode et plus direct". Il propose donc de le redresser et de l'élargir, tout en faisant de même pour le canal de la Repentie. Un plan de ce projet est établi dès le 13 juin 1798.

Le projet Demetz n'est toutefois pas réalisé. Le plan établi par Tréton-Dumousseau en 1807 vient alors en appui à un autre projet d'aménagement du port de Coulon, établi par ce même ingénieur, cette fois avec plus de succès. Le plan montre, en lignes rouges, en quoi il consiste, à savoir abandonner la Vieille Sèvre de la Repentie pour l'usage de la navigation et créer un nouveau cours de la Sèvre, rectiligne, plutôt que de réutiliser le bras historique comme le préconisait Demetz. Prenant naissance au niveau de Maurepas, le nouveau lit suivra une ligne droite vers le sud-ouest, traversera des jardins et vergers pour aboutir à une nouvelle confluence avec la Vieille Sèvre de la Repentie, au niveau de l'îlot de Jean Guillemot. La nouvelle Sèvre sera ainsi déportée vers le sud par rapport au bras historique.

Cette même année 1807, des habitants de Coulon protestent contre les travaux envisagés car ils vont rapprocher la rive du fleuve de leurs habitations. Malgré tout, en application du projet Tréton-Dumousseau, un nouveau cours de la Sèvre est donc creusé dans la partie basse du bourg de Coulon, et un quai est aménagé sur sa nouvelle rive droite. Les travaux sont réalisés par l'entrepreneur Ouvrard qui rend compte de leur état d'avancement au préfet des Deux-Sèvres le 13 juin 1808. Le nouveau canal creusé doit mesurer 392 mètres de long sur 12 de large. Il est vraisemblablement achevé avant 1810. Cette année-là, plusieurs propriétaires riverains portent réclamation pour non-paiement de ce que leur doit l'Etat à titre d'expropriation de leurs biens, compensée par l'attribution de portions de l'ancien lit historique de la Sèvre qui est mis en vente. Le comte de Sainte-Hermine par exemple, héritier de l'ancien seigneur de Coulon, a cédé 463 mètres de rives dans son pré de Maurepas, et doit recevoir 48 mètres le long de sa propriété et 210 autres mètres sur la même rive droite de la Sèvre.

Au terme de ces aménagements, la rive droite du fleuve dans la traversée de Coulon présente désormais la forme, comme le montre le plan cadastral de 1833, d'une ligne interrompue de temps à autres par des cales situées au débouché des rues principales (rues de l'Eglise, de la Péchoire, du Four, de la Douve...). On a surtout maintenu, essentiellement à la demande des riverains, plusieurs des anciens cours d'eau perpendiculaires au fleuve, avançant au milieu des habitations et servant de ports (par exemple à la place de la rue de la Douve, si bien nommée, de la rue du Château bas et de la rue du Port aux Moules). Certains de ces cours d'eau sont franchis par des passerelles pour assurer malgré tout la continuité du halage.

L'aménagement et la modernisation des quais dans les années 1840-1870

De tels ouvrages et les cours d'eau qui viennent se jeter dans la Sèvre, constituent toutefois des obstacles que les autorités entendent progressivement éliminer. Le 17 octobre 1835, une ordonnance royale est prise sur l'alignement et l'élargissement de la Sèvre dans la traversée de Coulon, sans toutefois de résultat immédiat. Le mauvais état des passerelles et la question posée de leur reconstruction donnent souvent l'occasion de les supprimer et, dans le même temps, de combler les cours d'eau qu'elles franchissaient, devenus avec le temps des dépôts insalubres. IL semble que le port aux Moules disparaît peu après, remplacé par la rue qui porte son nom. En 1839 puis 1842, une pétition réclame la reconstruction de la passerelle qui, prolongeant le quai, franchit l'ancien fossé ou port de la Péchoire (actuelle rue du Château bas). Devenu un cloaque insalubre, rempli de vases, ce fossé devra aussi être comblé. Soutenu par l'Etat, ce projet est mis en oeuvre en 1850, donnant naissance à la rue du Château bas. Peu après est comblé le ruisseau appelé la Douve du Logis, qui descendait depuis l'ancien logis seigneurial et contournait le bourg par le nord-est : en 1855, décision est prise de combler cette ancienne "douve" pour y créer une rue, la rue de la Douve qui, avec la rue Main, servira de liaison entre les bords de Sèvre et la rampe du pont de Coulon tout juste construit. Grâce à ces aménagements, la ligne du quai de la rive droite est peu à peu constituée. Toutefois, ces rives, non maçonnées, se dégradent à cause d'éboulements, et le lit de la Sèvre s'envase de plus en plus.

Le redressement et l'alignement du cours de la Sèvre à travers le port de Coulon, tels que souhaités par l'ordonnance royale de 1835, ne sont réalisés qu'à partir de 1867-1868, dans le cadre du grand programme général d'amélioration de la Sèvre Niortaise de Niort à Marans, déclaré d'utilité publique le 2 novembre 1866. Le projet d'aménagement du port de Coulon est présenté par l'ingénieur des Ponts et Chaussées Eugène Espitallier le 6 mars 1867, et approuvé par décision ministérielle du 29 avril. L'objectif est en premier lieu, pour l'Etat, de faciliter la navigation et l'évacuation des inondations. Espitallier prévoit tout d'abord de recalibrer le lit du fleuve entre Sevreau et Coulon, ainsi que celui de la Vieille Sèvre ou bras de Sevreau. Il s'agit aussi de faciliter dans la traversée du port de Coulon l'accès au fleuve depuis les rives ainsi que l'abordage des bateaux. Espitallier propose donc de moderniser les quais de Coulon : jusqu'ici en terre et informes, ils seront maçonnés et alignés, avec la création de 14 escaliers (8 sur la rive droite et 6 sur la rive gauche) disposés régulièrement pour accéder plus facilement à l'eau, et reliés entre eux par des perrés inclinés. Les moellons et pierres de taille utilisés proviendront des carrières de Benet. Rive droite, le projet consiste aussi à moderniser les cales placées au droit des rues principales du bourg, soit au débouché de la rue de l'Eglise (projet de cale à une rampe, modifié ensuite en une cale en plan incliné à trois pans), de la rue de la Péchoire (cale à deux rampes) et de la nouvelle rue de la Douve, sans oublier la grande cale de la place de la Coutume. L'alignement des quais nécessitera, rive gauche, de démolir certains bâtiments, et l'on y créera une passerelle pour franchir la Vieille Sèvre de la Repentie. Adjugés à Jean-Louis Bonneau, entrepreneur à Niort, les travaux commencent en juin 1868 par le curage du bras de Sevreau, puis dans le port de Coulon le 15 septembre, avec la construction des batardeaux nécessaires. Les matériaux utilisés et les déblais opérés sont déposés sur la rive gauche où les habitations sont encore en nombre limité.

A ce programme voulu par l'Etat et qui commence donc à être mis en oeuvre, s'ajoutent les revendications de la population, relayées par le conseil municipal les 19 juillet et 31 août 1868. L'Etat et la commune débattent alors vivement de la nature, du nombre, de l'emplacement et du financement des cales, abreuvoirs et lavoirs envisagés. L'Etat estime notamment que l'utilité locale de certains de ces aménagements, justifie un seul financement communal. La commune de son côté juge qu'en donnant la priorité à la navigation, en déclin car concurrencée par le chemin de fer, le projet de l'Etat porte préjudice à l'économie locale, pourtant en pleine expansion. Le 5 avril 1869, Espitallier ajoute à son projet la construction d'une cale-abreuvoir en aval de la place de la Coutume (soit un plan incliné à trois pans), et d'un lavoir entre la rue de l'Eglise et la place de la Coutume (devant l'actuelle mairie), constitué d'une banquette et d'un mur de soutènement, avec des escaliers d'accès. Le conseil municipal donne son accord le 21 avril, en acceptant de payer sa part des opérations. Les travaux d'aménagement du port peuvent donc continuer, en prenant en compte ces modifications. Autre sujet débattu : la passerelle prévue sur la Vieille Sèvre de la Repentie, rive gauche, et que les riverains et usagers réclament de transformer en un véritable pont, avec empierrement du chemin de halage et création d'une cale. Un apport financier de la commune et la mise à disposition des terrains nécessaires, permet d'envisager cette nouvelle modification du projet, et Espitallier présente le 19 août 1869 les plans du pont souhaité. Le 30 juillet 1870 a lieu la réception définitive des travaux d'aménagement du port.

La cale-abreuvoir de la rue de la Péchoire, formée d'une plateforme en bord de rivière et de deux rampes d'accès, ce qui la rend difficile d'utilisation, voire dangereuse, est reconstruite en 1884, sur le modèle de celle de la rue de l'Eglise (soit un plan incliné, à trois pans), avec un financement communal et grâce à une souscription.

Les quais, dégradés, ont commencé à être restaurés à partir de 1994, et surtout à partir de 2000. Le quai rive droite porte le nom de Louis Tardy (1875-1961), natif de Coulon (Maison de la Coutume), conseiller d'Etat, maire de Coulon de 1947 à sa mort, l'un des fondateurs de la Caisse nationale du Crédit agricole.

Périodes

Principale : 1er quart 19e siècle, 3e quart 19e siècle

Dates

1807, daté par source

1868, daté par source

Auteurs Auteur : Tréton-Dumousseau Pierre

Né le 15 mars 1766 à Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire), fils d'un conseiller du roi et lieutenant en l'élection de cette ville, il se marie en 1792, à Saumur, avec Eulalie Blancler. A cette date, il est déjà ingénieur des Ponts et Chaussées et demeure à Conflans-Charenton (Charenton-le-Pont), près de Paris. Selon les lieux de naissance de ses enfants, il demeure successivement à Saint-Hilaire-Saint-Florent (Saumur) en 1796, Saint-Symphorien près de Tours, en 1802, Tours en 1804. En 1805, Pierre Tréton-Dumousseau est nommé ingénieur en chef des Ponts et Chaussées à Niort où naît son fils, Paul, en janvier 1806. François-Philippe Mesnager lui succède à la tête du service ordinaire des Deux-Sèvres en 1811. Affecté en Vendée puis dans les Côtes-du-Nord en 1813, actif dans la Haute-Vienne sous la Restauration, il prend sa retraite en juillet 1823, et décède le 28 mai 1835 au Coudray-Macouard, près de Saumur.

, ingénieur des Ponts et Chaussées (attribution par source)
Auteur : Espitallier Eugène

Ingénieur des Ponts et Chaussées dans la seconde moitié du 19e siècle.

, ingénieur des Ponts et Chaussées (attribution par source)

Le port de Coulon s'étire tout le long de la rive droite de la Sèvre Niortaise longeant le bourg au sud. Au-delà de la place de la Coutume et de sa grande cale, il s'étend sur le quai Louis Tardy, entre le pont de la route de Magné, en amont, et les dernières maisons du bourg en aval. L'espace se compose d'un quai, vertical ou incliné, d'une étroite plateforme, et d'un pan incliné en moellons, ponctué d'escaliers qui conduisent à la rue longeant le quai. Le linéaire est interrompu par la grande cale au niveau de la place de la Coutume. Une longue cale-abreuvoir, surmontée d'un mur de soutènement, s'étire en amont de la passerelle, au niveau de la mairie. En amont de la rue de l'Eglise, le quai se limite à un perré en maçonnerie, incliné, entrecoupé d'escaliers et de quelques cales, avec ou sans mur de soutènement, situées au droit des principales rues.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : moellon

  2. Mise en oeuvre : pierre de taille

Toits

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Deux-Sèvres , Coulon , quai Louis Tardy

Milieu d'implantation: en village

Lieu-dit/quartier: Bourg

Cadastre: 1833 D, 2024 AK

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